Carbonlife https://carbonlife.fr Protection de la biodiversité par les puits de carbone Fri, 17 Jan 2025 09:31:58 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.6.2 https://carbonlife.fr/wp-content/uploads/2020/09/cropped-Capture-d’écran-2020-09-28-à-15.43.31-32x32.png Carbonlife https://carbonlife.fr 32 32 La juste valorisation du carbone des Puits https://carbonlife.fr/recherches-puits-de-carbone/economie/la-juste-valorisation-du-carbone-des-puits/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=la-juste-valorisation-du-carbone-des-puits Fri, 17 Jan 2025 08:48:54 +0000 https://carbonlife.fr/?p=16367 La juste valorisation du carbone des Puits Par Frédéric Dietrich – 17/01/2025. Calculateur (Teq/CO2) En référence à la neutralité carbone, Puits et sources ne jouent pas à armes égales.  En effet, si à l’international, on compte une absorption de CO2 par les Puits pour deux émissions par les sources de CO2, en France ce rapport […]

The post La juste valorisation du carbone des Puits first appeared on Carbonlife.

]]>

La juste valorisation du carbone des Puits

Par Frédéric Dietrich – 17/01/2025.

En référence à la neutralité carbone, Puits et sources ne jouent pas à armes égales.  En effet, si à l’international, on compte une absorption de CO2 par les Puits pour deux émissions par les sources de CO2, en France ce rapport s’étend à près d’une absorption par les Puits pour 24 émissions par les sources.   L’exemple parlant de l’arbre en qualité de Puits et de la voiture en correspondance de sources explique ce contraste.  Il faut 50 arbres pour compenser les émissions d’une seule voiture.  Pourtant, les marchés du carbone fixent un prix similaire (en Teq/CO2) entre le rare carbone des Puits et l’abondant carbone des sources.  À l’instar du combat entre David et Goliath, les Puits sont dévalorisés par rapport aux sources.  C’est pourquoi Carbonlife propose de valoriser la Teq/CO2 des Puits en considération du facteur abondance/rareté.

La juste valorisation du carbone des Puits

Le profond déséquilibre entre émissions par les sources et les absorptions par les puits

Pour que le lecteur saisisse à quel point le déséquilibre est grand entre les émissions par les sources et les absorptions par les puits, nous prendrons l’exemple parlant de la voiture et de l’arbre.  L’un inerte, l’autre Vivant.

Une voiture thermique moyenne, comprise comme source, émet près de 1,5 Teq-CO2 par an, lorsqu’un arbre moyen, senti comme Puits de carbone organique, absorbe 30 Kg eq- CO2 par an, soit 0,03 Teq-CO2 par an.  En clair, il faut 50 arbres pour compenser les émissions annuelles d’une seule voiture thermique.  Les chiffres sont similaires pour les véhicules électriques (en considérant qu’une voiture électrique émet 100 Teq/CO2 par kilomètre pour un kilométrage de 15.000 Km à l’année).  En effet, la production de voitures électriques a un bilan carbone deux fois plus élevé que celle des voitures thermiques, notamment lors de la fabrication des batteries (Hurel et al., 2024).  Ainsi, bien que la mise en circulation d’un véhicule électrique réduise les émissions directes, il demeure que les véhicules électriques sont des émetteurs indirects de CO2.  Selon l’origine de l’électricité, le bilan peut s’alourdir au point de dépasser le bilan des voitures thermiques, par exemple lorsque l’électricité provient de centrales à combustion de charbon ou de biomasse.

S’ajoute à ce bilan largement défavorable au Vivant, la valeur financière très faible du carbone des Puits de l’arbre.  Sur un marché carbone coté à 60 Euros/TeqCO2, le carbone absorbé par un arbre représente un actif estimé à 1,8 euro par an, alors que le carbone émis de la voiture a un passif avoisinant les 90 euros par an. 

Face à la financiarisation de la lutte climatique, le Vivant est sous-coté.

La rareté du carbone des Puits face à l’abondance du carbone des sources, une hérésie économique

En vertu de l’obligation à la neutralité carbone, la lutte climatique réside en la compensation entre les émissions par les sources et les absorptions par les puits (art. L. 100-4-I-1°, Code de l’énergie).

En se référant aux chiffres du budget du carbone mondial pour l’année 2023, les émissions par les sources sont estimées à 36 Giga Teq/ CO2 lorsque les absorptions par les puits sont évaluées à 22 Giga Teq/ CO2 (Friedlingstein et al., 2023).  En proportion, il y a un peu moins de deux carbones de source pour un carbone de Puits.  Lorsque l’on se place à l’échelle d’un pays ou d’un département, la rareté du carbone de Puits s’amplifie.  En effet, on compte près de vingt-quatrecarbones de source pour un carbone de Puits au niveau national en 2022 (CITEPA, 2023).  En substance, ces chiffres démontrent qu’au niveau national le carbone de Puits est 24 fois plus rare que le carbone de source.

Ce clivage confère au carbone de Puits une forme de rareté face au carbone de source.

Ainsi que David Ricardo le disait : « tant qu’elles possèdent une utilité, les marchandises tirent leur valeur d’échange de deux sources : leur rareté et la quantité de travail nécessaire pour les obtenir » (Ricardo, 1992).  De même, la « main invisible » chère à Adam Smith renvoie à une situation d’équilibre entre le prix de marché et le prix naturel selon les règles de l’offre et la demande, ce qui a pour conséquence de réguler les marchés (Smith, 1759).  En comparaison à une chose abondante, une chose devenue rare voit sa valeur augmentée.  Seulement voilà, les cotations des marchés du carbone sont administrées par les États par les allocations de crédits et quotas.  Ces derniers biaisent la règle fondamentale de l’offre et de la demande.

En effet, comment se fait-il que le carbone de source polluant et abondant soit vendu au même prix qu’un carbone de Puits rare et dépolluant ? 

Le réajustement du critère de rareté du carbone des Puits

Nous avons fait le choix de valoriser le carbone des Puits du service écosystémique de régulation du climat, en rétablissant le critère de rareté du Vivant.

Ce rétablissement est fondé sur le degré d’abondance/rareté entre le carbone de sources et le carbone de Puits.  Selon les régions, les départements ou au niveau national, nous tenons compte des documents officiels faisant étant des flux de carbone qui fixent le rapport abondance/rareté.

Au niveau national par exemple, attendu qu’il y a 24 carbones de sources pour 1 carbone de Puits, le prix de la Teq/ CO2s’élèvera à 24 fois la cotation des marchés du carbone que nous fixons à 100 euros la Teq/ CO2. En France métropolitaine, le carbone de Puits s’établira alors à 100 euros multipliés par 24, c’est-à-dire 2.400 euros la Teq/ CO2.

À l’île de la Réunion où il y a 10 carbones de sources pour 1 carbone de Puits, la valeur de la Teq/ CO2 sera fixée à 100 euros multipliés par 10, soit à 1.000 euros la Teq/ CO2.

Bien entendu, ce réajustement compris entre 1.000 et 2.400 euros la Teq/ CO2 est réajustable en fonction de critères propres au Puits de carbone valorisé comme la dimension patrimoniale, culturelle, éducative ainsi qu’à la vigueur des services écosystémiques du Puits de carbone organique.

Références

CITEPA, « Gaz à effet de serre et polluants atmosphériques. Bilan des émissions en France de 1990 à 2022 », 2023, p. 575

FRIEDLINGSTEIN P., O’SULLIVAN M., JONES M.W., ANDREW R.M., BAKKER D.C., HAUCK J., LANDSCHÜTZER P., LE QUÉRÉ C., LUIJKX I.T. et PETERS G.P., « Global carbon budget 2023 », Earth System Science Data, 15, no 12, Copernicus GmbH, 2023, p. 5301‑69

HUREL L. et GIRARD R., La fin de vie des batteries des véhicules électriques, un impensé de la transition énergétique?, PhD Thesis, Ecole nationale Supérieure des mines de Paris, 2024, https://hal.science/hal-04702677/, consulté le 23 décembre 2024.

RICARDO D., CONSTÂNCIO F.S. et SAY J.B., Des principes de l’économie politique et de l’impôt, Paris, GF-Flammarion, 1992, p. 52.

SMITH A., Théorie des sentiments moraux, Paris, PUF, coll. « Léviathan », 1759, p. 257.

The post La juste valorisation du carbone des Puits first appeared on Carbonlife.

]]>
Verger conservatoire de mangues https://carbonlife.fr/parrainage/verger-conservatoire-de-mangues/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=verger-conservatoire-de-mangues Mon, 25 Nov 2024 08:35:15 +0000 https://carbonlife.fr/?p=15864 La plus grande collection de manguiers de la Réunion 9 Teq/CO2 en 5 ans En absorbant et en séquestrant près de 9 tonnes de CO2 tous les 5 ans, la collection de manguiers du lycée agricole de Saint-Paul est un authentique Puits de carbone organique. Près de 35 espèces de manguiers composent ce verger de […]

The post Verger conservatoire de mangues first appeared on Carbonlife.

]]>

La plus grande collection de manguiers de la Réunion

9 Teq/CO2 en 5 ans

En absorbant et en séquestrant près de 9 tonnes de CO2 tous les 5 ans, la collection de manguiers du lycée agricole de Saint-Paul est un authentique Puits de carbone organique.

Près de 35 espèces de manguiers composent ce verger de 75 arbres. Résiliente, cette réserve génétique est garante de la durabilité de la filière mangue à La Réunion.

Enlacée d’espèces endémiques, la collection de manguiers s’inscrit dans une dynamique éducative d’exception au bénéfice des générations futures.

Mangue "Haden"
Mangue "Prade"
Mangue "Wetley"
Mangue "David Haden"
Mangue "Saucisse"
Mangue "Lise"
Mangue "Tété"
Mangue "Auguste"
Mangue "Pierre Fontaine"
Mangue "Emile"
Mangue "Nam doc mai"
Mangue "Genève"
Diapositive précédente
Diapositive suivante

§1- Un verger garant de la filière mangue

Vue aérienne verger
Le verger conservatoire se situe à St Paul, dans l’Ouest de l’île de La Réunion. Constitué de près de 75 arbres, il s’étend sur une surface de 0,26 hectare (en bleu).
Une des allées du verger
Le verger compte près de 13 allées de manguiers.

La mangue est en Orient ce que la pomme est en Occident, un mélange emblématique de passion, fertilité et abondance.  « Fruit de l’amour » par excellence, elle tient une place à part dans le cœur des hommes qui la célèbrent année après année.  Introduite à La Réunion en 1770, la mangue porte une très forte valeur culturelle et patrimoniale.  Les Réunionnais consomment la mangue de diverses manières : en rougail, en carry et bien entendu en dessert sous sa forme brute, en sorbet ou encore en rhum arrangé. 

Accompagné par la Chambre d’agriculture et par le Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (CIRAD), le lycée agricole de Saint-Paul ne s’est pas trompé en créant cette collection génétique hors du commun comptant plus de 35 espèces différentes.  Des espèces emblématiques de La Réunion – telles que la rustique « mangue Carotte » ou la savoureuse « mangue José » – côtoient d’autres espèces des quatre coins du monde comme la « Nam Doc Mai » de Thaïlande, la « Kensington » d’Australie, ou encore la « Haden » de Floride. 

Durant la période de l’Été austral, des mangues de toutes les couleurs agrémentent le verger d’une teinte remarquable.  Vert, rouge, jaune et même mauve ou bleu : la variabilité génétique du verger se dessine aux yeux de l’observateur durant la période de fructification.

Cette réserve génétique est garante de la filière mangue de l’île.  Pour s’en convaincre, il suffit de se remémorer les ravages de la maladie de la tache noire en 2012, ou encore l’arrivée de la mouche des fruits (Bactrocera dorsalis) en 2017.  Parmi les espèces de manguiers représentées, certaines se sont montrées résistantes aux maladies et aux bioagresseurs.  Ainsi, si les mêmes phénomènes se reproduisaient dans le futur, il résiderait – dans cette collection génétique – quelques individus résistant à ces fléaux.  Si nul ne sait de quoi demain sera fait, il est acquis que ce verger est gage de durabilité écologique et de continuité culturelle.

§2- Une collection génétique résiliente offerte aux générations futures

Porte-greffe « Maison rouge » surmonté de son greffon.

Baigné par le soleil généreux de la « Plaine Saint Paul », le verger bénéficie de bonnes conditions environnementales et climatiques.  Pour compléter ces conditions favorables, les exploitants ont opté pour la méthode agricole dite du « porte-greffe ».  Cette méthode consiste à implanter un greffon sur un porteur – ledit porte-greffe – dont les qualités adaptatives à l’écosystème ont été éprouvées.  Considéré comme l’un des premiers manguiers identifiés à La Réunion, le « Maison rouge » a été choisi en raison de son système racinaire puissant.  Ayant démontré sa résistance face aux cyclones, cette espèce est capable de puiser l’eau en profondeur durant les périodes de sècheresse. À cela s’ajoute une résistance intrinsèque aux maladies, aux virus comme aux bactéries du sol.  Les qualités génétiques du porte-greffe confèrent à la collection de manguiers une résilience marquée face aux aléas climatiques et environnementaux.  Sont alors greffées sur ce porte-greffe, les 35 espèces de manguiers qui composent cette collection conservatoire.

Garante de la filière mangue à La Réunion, cette réserve génétique est un présent des générations présentes offert aux générations futures.

Pour compléter la dimension générationnelle, cette collection s’inscrit dans une dynamique éducative et pédagogique portée par le lycée agricole de Saint-Paul.  Depuis sa création en 1989, cet Établissement Public Local d’Enseignement et de Formation Professionnelle Agricoles (EPLEFPA) a formé des générations d’agriculteurs.  Une dimension pélagique et éducative d’exception s’ajoute ainsi à la résilience et à la durabilité de cette collection.

§3- La vigueur écosystémique du verger

Haie d'espèces endémiques
Espèces endémiques
En qualité de corridor de Biodiversité à haute valeur écosystémique, ce verger ouvert est composé de haies d’espèces endémiques où la faune circule librement selon le principe de la « Trame verte ».

Comprise comme Puits de carbone organique, la collection de manguiers recouvre l’ensemble des 4 services écosystémiques :

  1. Tous les 5 ans, le verger absorbe et séquestre près de 9 Tonnes équivalents CO2 par le service écosystémique de régulation du climat. En moyenne, chaque manguier retire alors près de 25 Kg de CO2 de l’atmosphère par an.  En atténuant les effets des changements climatiques, cette collection de manguiers est donc un authentique Puits de carbone organique.  À mesure que les arbres grandissent, le stockage du carbone par le verger est appelé à augmenter dans les 30 prochaines années.
  1. Souscrivant à l’agriculture biologique, les mangues cultivées sont dépourvues de toutes traces d’herbicides et de fongicides. En outre, les fruits produits sont commercialisés selon des circuits courts. Le service écosystémique d’approvisionnement alimentaire se veut donc éthique et soucieux de la santé des consommateurs.
  1. Entouré par des haies composées d’espèces endémiques, le verger est un corridor de Biodiversité conforme à la « trame verte » (Art. L. 371-1, Code de l’env.). Bois d’olive (Olea lancea), Bois de demoiselle (Phyllanthus casticum) Bois de joli cœur (Pittosporum senacia), Porché (Thespesia populnea), Bois de senteur blanc (Ruizia cordata), Mahot tantan (Dombeya acutangula), Mauve Abutilon exstipulare, Bois de judas (Cossinia pinnata), Bois rouge (Elaeodendron orientale) composent les haies du verger.  L’objectif est donc d’enrayer la dégradation de la Biodiversité en participant à la préservation, à la gestion et à la remise en bon état des milieux.  Ces actions signent un service écosystémique de soutien à la Biodiversité propre à dynamiser le Vivant.
  1. Lorsque les élèves et étudiants de l’EPLEFPA contemplent le verger, ils ont alors sous les yeux un modèle agricole vertueux leur servant d’exemple à suivre. En formant les agriculteurs de demain, la dimension éducative portée par cette collection de manguiers démontre alors un solide service écosystémique social.

§4- Intérêts d’une entreprise au parrainage de ce verger

Logo Verger

Le Concept de Parrainage de Puits de carbone est une innovation juridique basée sur des recherches doctorales.  De la même manière qu’un sportif se finance par un sponsor qui en retour tire un bénéfice en matière d’image, le parrainage des Puits de carbone contribue à un regain de notoriété qui améliorerait l’image de l’entreprise qui y contribuerait.  Quant au titulaire du Puits de carbone, il est enfin rémunéré et valorisé pour les soins qu’il prodigue à la Nature et à l’environnement.

Conformément aux récentes évolutions du droit, les entreprises doivent démontrer leurs implications dans la protection de la Biodiversité et du climat, ce à quoi les Puits de carbone sont en mesure de participer.

En outre, le parrainage d’un Puits de carbone organique agrémente la politique de Responsabilité Sociale en Entreprise (RSE) dûment normalisée (art. L. 225-102- 1, Code de commerce).

En parrainant un Puits de carbone, une entreprise coche un grand nombre de critères relatifs à l’Environnement, au Social et à la Gouvernance (ESG) maintenant imposés par le droit européen en matière d’environnement (Règlement (UE) 2020/852). 

À ce titre, un dispositif d’accompagnement en RSE est prévu pour l’intégration du parrainage dans le reporting extra-financier de l’entreprise qui se prêterait à ce sponsor.

Mais au-delà de ce cadre légal, le parrainage de cette collection de conservation de manguiers s’inscrit dans une démarche vertueuse qui, de fait, finance une institution éducative qui œuvre depuis plus de 30 ans à l’instruction des générations futures (§2).  Sponsoriser ce Puits de carbone d’exception revient à soutenir la bonne continuité de la filière mangue à La Réunion dont l’intérêt patrimonial est inestimable (§1).

Compte tenu de la vigueur des services écosystémiques en présence (§3), la Tonne équivalent CO2 (Teq/CO2) du verger est alors valorisée à hauteur de 2.000 euros pour une captation estimée à 9 Teq/CO2 en 5 ans.  À cette valeur de parrainage portée à 16.000 euros en 5 ans s’ajoute la rémunération de CarbonLife en charge de la rédaction du contrat, de la mise en contact et de l’intégration du parrainage dans la politique RSE de l’entreprise.

Pour cet engagement financier relativement raisonnable, l’entreprise parraine verra son image gratifiée par une innovation juridique sans pareil et pourra alors se présenter comme un véritable soutien au patrimoine réunionnais, à l’éducation et à l’intérêt générationnel.

The post Verger conservatoire de mangues first appeared on Carbonlife.

]]>
Pourquoi parrainer un Puits de carbone ? https://carbonlife.fr/recherches-puits-de-carbone/economie/pourquoi-parrainer-un-puits-de-carbone/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=pourquoi-parrainer-un-puits-de-carbone Mon, 04 Nov 2024 07:20:21 +0000 https://carbonlife.fr/?p=15789 Pourquoi parrainer un Puits de carbone ? Par Frédéric Dietrich – 04/11/2024. Calculateur (Teq/CO2) On ne compte plus les protecteurs du Vivant qui œuvrent anonymement au renforcement de la Biodiversité, cette Biodiversité qui séquestre directement ou indirectement le carbone atmosphérique et que l’on appelle également les Puits de carbone organiques.  Pourtant, alors qu’ils protègent jour […]

The post Pourquoi parrainer un Puits de carbone ? first appeared on Carbonlife.

]]>

Pourquoi parrainer un Puits de carbone ?

Par Frédéric Dietrich – 04/11/2024.

On ne compte plus les protecteurs du Vivant qui œuvrent anonymement au renforcement de la Biodiversité, cette Biodiversité qui séquestre directement ou indirectement le carbone atmosphérique et que l’on appelle également les Puits de carbone organiques.  Pourtant, alors qu’ils protègent jour après jour la Vie, ces bienfaiteurs ne sont pas soutenus financièrement.  De leur côté, les entreprises ont un besoin qui vise à démontrer leurs actions en faveur de la protection de l’environnement et du climat par la politique de Responsabilité Sociale en Entreprise (RSE).  

Émerge alors l’idée qui consisterait à faire parrainer un Puits de carbone par une entreprise.  Rien de nouveau en soi : les entreprises sponsorisent depuis longtemps des sportifs, alors pourquoi pas des Puits de carbone ?  

Dans ce projet, tous les acteurs s’y retrouvent.  Sous conditions d’obligation de protection, le titulaire du Puits de carbone est rémunéré pour les services écosystémiques générés, notamment la captation de CO2 par la Vie qui atténue les effets des changements climatiques.  Quant à l’entreprise parraine, elle tire un regain de notoriété par une innovation juridique et marketing sans précédent.

Parrainage des Puits de carbone

Faire rémunérer les protecteurs du Vivant au bénéfice des générations présentes et futures

On pourrait l’appeler le Vivant, la Biodiversité ou encore les Puits de carbone organiques ; la Nature est un véritable trésor qui nous a été confié et dont nous sommes responsables.  Malheureusement, ce trésor se réduit en peau de chagrin.  Loin de nous l’idée de verser dans un catastrophisme indécent, mais il convient de préciser que près de 69 % des espèces sauvages auraient déjà disparu en 50 ans (McRae L. et al., 2017).  Heureusement pour nous, des petites mains bienveillantes contribuent au renforcement, au soin et à la protection des Puits de carbone sans le crier sur les toits. Affirmons-le : en protégeant un Puits de carbone, nous marions l’atténuation des effets des changements climatiques à la protection de la Biodiversité.  Une pierre, deux coups.

Pourtant, ces bienfaiteurs ne sont pas gratifiés pour leurs efforts vertueux qu’ils prodiguent à la Vie et au climat.  En effet, alors qu’ils offrent la possibilité aux générations présentes et futures à pouvoir vivre dans un environnement sain et respectueux de la santé (art. 1, Charte de l’env. 2004), ces héros anonymes sont les « laissés-pour-compte » d’une valorisation économique.  Ne serait-il pas temps de rétribuer ces personnes ?

Pour cette raison est née l’idée selon laquelle il conviendrait de faire rémunérer les protecteurs du Vivant pour leurs efforts méritants envers l’environnement.  Reste à déterminer le moyen d’y parvenir…  En ce sens, le choix s’est porté sur le parrainage des Puits de carbone organiques.

Les bénéfices en retour que tirent les entreprises au parrainage d’un Puits de carbone

Pour expliquer le sens de ce projet, il nous a fallu trouver des analogies connues dans la société civile.  Ainsi, de la même manière qu’une entreprise sponsorise un sportif, elle peut également parrainer un Puits de carbone.    Les bénéfices qu’aurait une entreprise à parrainer un sportif ou un Puits de carbone sont tout autant les mêmes : tirer un regain de notoriété en matière d’image.  Cependant, les avantages à parrainer un Puits de carbone ne s’arrêtent pas là.

Les récentes évolutions du droit imposent aux entreprises – notamment cotées – de démontrer leur implication dans la lutte climatique et dans la lutte contre l’érosion de la Biodiversité (Blin-Franchomme, 2017).  En parrainant un Puits de carbone, une entreprise marie ces deux luttes, ce qui ne manquera pas de valoriser sa gouvernance en termes de Responsabilité Sociale en Entreprise (RSE).  En effet, les développements récents du droit imposent aux entreprises la transparence de leur politique RSE par une déclaration de performance nommée le « reporting extra-financier » (art. L. 225-102- 1, Code de commerce).  Ce document se doit de respecter les normes communautaires relevant des critères liés à l’Environnement, à la Société et à la Gouvernance (ESG).  Ces critères forment d’ailleurs la structuration du reporting (Règlement (UE) 2020/852).  Solidement installés, les Puits de carbone font partie des objectifs environnementaux qu’il convient de respecter (art. 9).  À toutes fins utiles, CarbonLife propose un dispositif visant à intégrer la valorisation du parrainage dans le reporting extra-financier de l’entreprise.

En résumé, une entreprise qui parrainerait un Puits de carbone organique conjuguerait un regain de notoriété de son image à sa politique RSE.  Cet acte vertueux est de nature à rassurer les actionnaires et courtiers qui maintiendront ou reporteront leurs portefeuilles sur son titre.  In fine, le parrainage d’un Puits de carbone confère à l’entreprise l’appréciation de son titre.

Parrainer un Puits de carbone, un cercle vertueux soutenu par le contrat environnemental

Le parrainage des Puits de carbone relève d’un cercle vertueux apte à promouvoir l’économie circulaire (COM (2019) 640 final du 11 décembre 2019, Le pacte vert pour l’Europe), où chaque Partie prenante trouve son compte.

Le titulaire du Puits de carbone se voit enfin rémunérer pour les actions menées en faveur de l’environnement comme en faveur des générations présentes et futures.

En plus de bénéficier d’avantages substantiels en matière de notoriété, l’entreprise parraine agrémente sa politique RSE de telle sorte que son titre puisse s’apprécier.

Quant à l’intermédiaire, il atteint l’objet poursuivi à savoir la valorisation et la protection des Puits de carbone.

Sur le fond, le parrainage des Puits de carbone est rendu possible par le contrat environnemental (Hautereau-Boutonnet M., 2015).  En l’espèce, il s’agit d’un contrat dont l’objet est l’environnement et que l’on nomme : Paiement pour Service Écosystémique (Lau W.W., 2013).  Ce type de contrat est éprouvé de par le monde, en France naturellement, mais aussi à Madagascar, au Viêtnam et même en Thaïlande (Thompson B.S., 2019).

Pour faire simple, sous couvert d’obligations de protection des éléments et fonctions des écosystèmes, le titulaire du Puits de carbone est en mesure d’être rémunéré pour les bénéfices individuels et collectifs que tire l’homme de l’environnement (art. 1247, Code civil) appelés services écosystémiques (art. L. 110-1-I, Code de l’env.) ou encore services écologiques (Vanuxem S, 2017).  On compte 4 types de services écosystémiques, dont celui relevant de la régulation du climat par la captation, directe ou indirecte, de CO2 atmosphérique (MEA, 2005).  Exprimée en Teq/CO2, la masse de CO2 absorbée par le processus et stockée dans le réservoir du Puits de carbone sert de base quantitative au service écosystémique de régulation du climat (Torre-Schaub M., et al., 2022).  À cette valeur s’adjoint le prix de la Teq/CO2 comprise entre 1.000 et 2.400 euros, ce qui fonde la valeur numéraire du contrat.

Un Puits de carbone parrainé par le contrat PSE est alors doublement protégé.  D’une part via les obligations qui incombent à son titulaire, et d’autre part en cas de dommages par un tiers en considération de la réparation du préjudice écologique (art. 1246 et suivants., Code civil).

Ainsi, outre sa capacité à satisfaire l’intégralité des Parties prenantes et acteurs, le contrat de parrainage Paiement pour Service Écosystémique valorise et protège les Puits de carbone et plus généralement la possibilité – pour les générations présentes et futures – à vivre sereinement dans un environnement équilibré et respectueux de la santé (art. 1, Charte de l’env. 2004).

Schéma

Références

BLIN-FRANCHOMME M.-P., « Quel rôle pour l’entreprise après l’Accord de Paris ? », Revue juridique de l’environnement, no H.S. 17, Lavoisier, 2017, p. 119‑33.

DIETRICH F., Entrée « Puits de carbone » ; in TORRE-SCHAUB M., JÉZÉQUEL A., LORMETEAU B. et MICHELOT A., Dictionnaire Juridique du Changement Climatique, Mare & Martin, coll. « Collection de l’Institut des sciences juridique et philosophique de la Sorbonne », vol. 69, 2022, p. 459-460.

HAUTEREAU-BOUTONNET M., Le contrat et l’environnement – Étude en droit comparé, Bruylant, coll. « Droit(s) et développement durable », 2015.

LAU W.W., « Beyond carbon: conceptualizing payments for ecosystem services in blue forests on carbon and other marine and coastal ecosystem services », Ocean & Coastal Management, 83, Elsevier, 2013, p. 5‑14.

MCRAE L., DEINET S. et FREEMAN R., « The diversity-weighted living planet index : controlling for taxonomic bias in a global biodiversity indicator », Plos one, 12, no 1, Public Library of Science San Francisco, CA USA, 2017, p. 20.

MILLENNIUM ECOSYSTEM ASSESSMENT, « Ecosystems and Human Well-being: Opportunities and Challenges for Business and Industry », Washington, World Resources Institute, 2005, p. 137.

THOMPSON B.S., « Payments for ecosystem services and corporate social responsibility: Perspectives on sustainable production, stakeholder relations, and philanthropy in Thailand », Business Strategy and the Environment, 28, no 4, mai 2019, p. 497‑511.

VANUXEM S., « Les services écologiques ou le renouveau de la catégorie civiliste de fruits ? », McGill Law Journal, 62, no 3, 2017, p. 739‑76.

The post Pourquoi parrainer un Puits de carbone ? first appeared on Carbonlife.

]]>
La portée générationnelle des Puits de carbone organiques https://carbonlife.fr/recherches-puits-de-carbone/droit/la-portee-generationnelle-des-puits-de-carbone-organiques/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=la-portee-generationnelle-des-puits-de-carbone-organiques Thu, 24 Oct 2024 06:11:46 +0000 https://carbonlife.fr/?p=15532 La portée générationnelle des Puits de carbone organiques Par Frédéric Dietrich – 24/10/2024. Calculateur (Teq/CO2) Le carbone absorbé par le processus des Puits carbone ne reste pas séquestré éternellement dans le réservoir.  En effet, le stockage du carbone est circonscrit à une temporalité que l’on nomme : le temps de résidence.  Allant de la journée aux […]

The post La portée générationnelle des Puits de carbone organiques first appeared on Carbonlife.

]]>

La portée générationnelle
des Puits de carbone organiques

Par Frédéric Dietrich – 24/10/2024.

Le carbone absorbé par le processus des Puits carbone ne reste pas séquestré éternellement dans le réservoir.  En effet, le stockage du carbone est circonscrit à une temporalité que l’on nomme : le temps de résidence.  Allant de la journée aux millions d’années, l’atténuation des changements climatiques orchestrée par cette temporalité des Puits de carbone touchera, soit les générations présentes, soit les générations futures. C’est pourquoi nous parlerons du principe des équités générationnelles. 

De plus en plus, il nous est donné l’occasion d’entendre qu’il faille sauver le climat pour les générations futures.  Mais, y a-t-il un sens à brandir les générations futures et non nées en éludant les générations présentes et actuelles qui elles aussi subissent les affres sociales et climatiques ?  Est-ce que ce ne sont pas les générations présentes qui engendrent les générations futures ?  Bien que le développement durable soit venu unifier les générations présentes et futures, une différence notable s’instruit entre ces générations qui ne jouissent pas des mêmes droits.  La primauté revienne aux générations présentes et actuelles, ces dernières ont un devoir de protection vis-à-vis des générations futures non nées.

Puits de carbone et principe des équités générationnelles

Le « Temps de résidence », cette nature juridique qui fonde la portée générationnelle des Puits de carbone

Si l’on se réfère à sa définition, un Puits de carbone compte trois natures juridiques (Dietrich, 2022).  Le processus, d’abord, qui absorbe le carbone atmosphérique directement ou indirectement.  Le réservoir, ensuite, qui stocke le carbone absorbé par le processus.  Et enfin, le temps de résidence qui représente le temps de séquestration du carbone dans le réservoir

Cette temporalité est très variable selon les Puits de carbone.  Du Puits-Sol au Puits-Océan, le temps de résidence du carbone dans le réservoir varie, respectivement, du million d’années à mille ans.  Pour ce qui est du Puits-Forêt et du Puits-Biodiversité, le carbone – qui est le matériau du vivant – est stocké le temps de l’espérance de Vie de l’Être dont il est question, c’est-à-dire de la journée à la centaine d’années.  On note alors une forte variabilité de séquestration du carbone dans le réservoir, de quoi fonder le principe de différenciation chez les Puits de carbone.

Mais un autre principe vient également s’inviter à la notion de Puits de carbone.  En effet, considérant la variabilité temporelle du temps de résidence allant de la journée aux millions d’années, l’atténuation des changements climatiques va concerner diverses tranches générationnelles.  Pour le Puits-Sol et le Puits-Océan, les vertus temporelles de séquestration des Puits vont toucher davantage les générations futures, alors que les bienfaits du Puits-Forêt et du Puits-Biodiversité vont s’adresser en priorité aux générations présentes.  Parce que les vertus des Puits de carbone relèvent autant des générations présentes que des générations futures, nous parlerons du principe des équités générationnelles

Intimement liés, nous remarquons que les principes de différenciation et des équités générationnelles sont régulièrement cités d’un seul tenant en droit (art. 3§1, CCNUCC 1992 ; art. L. 110-1-II, Code de l’env.).

Le développement durable, un principe qui conjugue les générations présentes aux générations futures

Si la notion de générations futures en droit a été remarquablement étudiée et éprouvée par la doctrine (Gaillard, 2011), l’intrication entre générations présentes et futures – tout comme sa portée juridique – reste encore toujours indicible. 

Pour agréger les intérêts des générations présentes à ceux des générations futures, il était alors indispensable qu’un autre principe puisse être en mesure de lier ces intérêts.  Bien connu du grand public, ce principe est celui du développement durable.  Il est communément admis que le Rapport Brundtland (1987) soit à l’origine de l’émergence de ce principe dans le droit. 

Afin que les générations présentes et futures se tendent la main, il est indispensable que l’accès et la jouissance aux ressources de notre planète se perpétuent dans le temps.  À ce titre, notre célèbre article L. 110-1-II du Code de l’environnement agrège les intérêts générationnels entre eux : « l’objectif de développement durable qui vise à satisfaire les besoins de développement et la santé des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs ».

Indubitablement, le principe de développement durable sert de jonction aux intérêts des générations présentes et futures.  Il suppose une gouvernance raisonnée des ressources présentes et actuelles afin qu’elles puissent également profiter aux générations futures et non nées.

Pour autant, il semble que ce principe ne soit pas une innovation juridique du club de Rome, tant s’en faut.  « Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme »… Tout comme en sciences, le droit ne se crée pas de toutes pièces.  Il se transforme, s’inspire des précédents pour se réhabiliter dans son temps.  Selon notre regard, le principe de développement durable n’est nullement né du Rapport Brundtland.  Il est inscrit depuis la nuit des temps dans le cœur des Êtres humains. En effet, les générations présentes ont toujours eu vocation à transmettre un patrimoine aux générations futures.  Dans cet objectif de transmission, les générations présentes et actuelles ne doivent pas scier la branche sur laquelle elles sont assises, de sorte qu’elles puissent transmettre aux générations futures la jouissance des ressources.  En témoigne la gestion « en bon père de famille » devenue la gestion « raisonnable » depuis la Loi pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes.  Imposée aux générations présentes, la charge de conserver la substance de la chose matricielle, sans altération, conditionne la possibilité d’une transmission aux générations futures.

Générations présentes et générations futures sur le même bateau

Peut-on alors parler des fruits sans l’arbre qui les produit ?  Peut-on se projeter vers les générations futures non nées sans faire état des générations présentes et actuelles ?  Notre passé judéo-chrétien revient alors à la charge.  Fruits de nos entrailles, ce sont bien les générations présentes qui engendrent des générations futures dont elles sont garantes.  En accentuant la métaphore, nous pourrions observer que les générations futures sont les « fruits » des générations présentes.  Oui, la Vie ne naît pas d’une génération spontanée.  En clair, sans génération présente, pas de génération future.  Il est alors heureux de constater que le droit cite les générations futures au côté des générations présentes qui les génèrent.

La dimension normative du droit a tout à fait compris ce positionnement qui a conquis l’ensemble de l’ordonnancement (art. 3§1, CCNUCC 1992 ; Consid. 45, Règlement n°2021/947 ; art. L. 110-1-I, Code de l’env.).  Désormais placé au sommet de la hiérarchie des normes, le principe des équités générationnelles s’est frayé un chemin dans notre Constitution et est aujourd’hui clairement consacré (Consid. 7, Charte de l’env. 2004).

À l’instar de ce célèbre adage voulant qu’il faille éviter de mettre la charrue avant les bœufs, il semble vain de se projeter sur les tenants et aboutissants les générations futures en éludant l’état des générations présentes qui les engendreront.  Cela veut-il dire que les générations présentes et actuelles ont la primauté sur les générations futures encore inexistantes. Cela en a tout l’air, car les générations présentes n’ont pas la même portée juridique que les générations futures au niveau, d’une part, du droit Objectif et, d’autre part, des droits subjectifs.

On appelle « droit Objectif » l’ensemble des règles de droit sanctionnées par l’autorité publique qui régissent la vie en société organisée, notamment, par le bloc de constitutionnalité.  On nomme « droits subjectifs » les prérogatives attribuées à un individu – dans son intérêt – lui permettant de jouir d’une chose, d’une valeur, ou d’exiger par ces dernières d’autrui une prestation.  Parmi les droits subjectifs, on retrouve par exemple le droit de propriété. Or, les générations futures et encore inexistantes ne sauraient se prévaloir ni de droit Objectif, ni de droits subjectifs.  Une différence de taille.

La différenciation juridique entre les générations présentes et actuelles à distinguer des générations futures non nées

Bien que les générations présentes et actuelles puissent se prévaloir de pertes de biens et services par suite des dommages dus aux changements climatiques, les générations futures et non existantes ne le peuvent.  Comme en témoigne cette décision de justice qui acte – en toute souplesse – la perte de bien et service consécutivement à l’érosion littorale du fait des changements climatiques sans indemnisation, c’est l’aliénation du droit Objectif et des droits subjectifs touchant les générations présentes qui s’étendra ensuite aux générations futures (Conseil constitutionnel, Décision n° 2018-698 QPC du 6 avril 2018).  Le droit de propriété est un témoin privilégié de cette observation.  Il va de soi que vous n’allez pouvoir transmettre aux futures générations un bien rongé par les assauts de la mer dont on vous a déjà privé.  Contrairement aux générations présentes et nées, les générations futures et encore inexistantes ne sont nullement titulaires de biens et services. 

N’y a-t-il pas un ver dans le fruit quant au fait d’associer les générations présentes et futures en un seul tenant alors que ces dernières ne jouissent ni de droit Objectif, ni de droits subjectifs ? Une clarification se devait alors d’intervenir par une jurisprudence remarquable qui est venue apporter la lumière sur la portée du principe des équités générationnelles. 

Il est des pays en Europe où la séparation des pouvoirs ne fait aucun doute, l’Allemagne en fait partie.  Outre sa décision remarquée en matière d’économie, la Cour allemande de Karlsruhe est venue clarifier les tenants et les aboutissants du principe des équités générationnelles.  Dans cette espèce, les requérants – qui se composent de plusieurs jeunes activistes, soutenus par des associations de défense de l’environnement – soutiennent que la Loi de programmation des objectifs climatiques dite « Klimaschutzgesetz » (Loi fédérale de protection du climat « Bundes- Klimaschutzgesetz ») manque d’ambition à satisfaire la neutralité climatique pour 2030 (Règlement (UE) 2021/1119). Au titre de la séparation des pouvoirs, si la Cour ne reproche pas au législateur l’insuffisance de réduction des émissions de GES prévue dans ladite Loi, elle s’interroge cependant sur les probables et gigantesques restrictions qui s’imposeront aux générations futures, postérieurement à 2030.  Si la Cour statue en indiquant que la Loi fondamentale Klimaschutzgesetz est insuffisante à satisfaire les objectifs climatiques, et qu’elle est de nature à porter préjudice aux générations futures, elle indique néanmoins que les « générations futures toutes entières (…) ne sont pas titulaires de droits subjectifs consacrés par les droits fondamentaux » (point. 109).  Selon les termes de la Cour, « [c]ette obligation de protection intergénérationnelle est toutefois de nature purement objective, étant donné que les générations futures ne peuvent, ni dans leur ensemble ni en tant que notion recouvrant la totalité des individus qui vivront alors, être considérées comme étant actuellement titulaires de droits fondamentaux » (point. 146). 

En somme, la Cour démembre le principe des équités générationnelles en deux : les générations présentes et actuelles qui sont effectivement titulaires de droits fondamentaux, à distinguer des générations futures qui ne sauraient s’en prévaloir. 

Mais c’est sur un autre aspect que la Cour de Karlsruhe a fait preuve d’une remarquable innovation juridique.  Pour compenser l’absence de droits fondamentaux dont ne sauraient se faire prévaloir les générations futures, la Cour conçoit « un devoir de protection également à l’égard de générations futures » (point 146).

N’est-ce pas une manière détournée d’attribuer – par ce devoir de protection – des droits aux générations futures ?  Et d’ajouter que ce devoir de protection aille « de pair avec l’impératif de prendre soin des fondements naturels de la vied’une manière qui permette de les léguer aux générations futures dans un état qui laisse à ces dernières un choix autre que celui de l’austérité radicale si elles veulent continuer à préserver ces fondements ».  Ainsi, par l’intermédiaire d’un devoir de protection édicté par la Loi Klimaschutzgesetz (art. 20-a), la Cour garantit l’accès et la jouissance à des fondements naturels de la Vie, ou plus généralement le droit de vivre dans un environnement et un climat sain respectueux de la santé humaine.

En d’autres termes, si les générations futures ne peuvent se prévaloir ni de la perte de biens et services, ni d’être titulaires de droits fondamentaux, la Cour leur octroie ces droits de manière indirecte en imposant à l’État un devoir de protection

Ainsi que nous l’avons argumenté, bien que les générations présentes et actuelles aient la primauté, elles ont malgré tout un devoir de protection qui leur incombe vis-à-vis des générations futures et non nées.

Le devoir de protection surgit alors comme un moyen remarquable de marier les générations présentes aux générations futures pour former le principe des équités générationnelles.

Références

Art. 578, Code civil : « L’usufruit est le droit de jouir des choses dont un autre a la propriété, comme le propriétaire lui-même, mais à la charge d’en conserver la substance ».

 

BRUNDTLAND G.H., « Our common future—Call for action », Environmental conservation, 14, no 4, Cambridge University Press, 1987, p. 291‑94.

 

Entrée « Fructus » : « Mot latin désignant l’un des trois attributs du droit de propriété sur une chose, le droit d’en percevoir les fruits, au sens large du terme, sans altération de la substance de la chose » ; DEBARD T. et GUINCHARD S., Lexique des termes juridiques 2019-2020, 27ième édition, Dalloz, 2020, p. 515.

 

GAILLARD E., Générations futures et droit privé : vers un droit des générations futures, LGDJ, coll. « Bibliothèque de droit privé », 2011.

 

Loi fédérale de protection du climat « Bundes- Klimaschutzgesetz », 24 mars 2021, 1 BvR 2656/18, 1 BvR 288/20, 1 BvR 96/20, 1 BvR 78/20.

 

Loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, dans JORF n°0179 du 5 août 2014.

 

Règlement (UE) 2021/1119 du Parlement européen et du Conseil du 30 juin 2021 établissant le cadre requis pour parvenir à la neutralité climatique, dans OJ L, vol. 243, 2021.

The post La portée générationnelle des Puits de carbone organiques first appeared on Carbonlife.

]]>
Allée des Flamboyants – Réunion https://carbonlife.fr/parrainage/allee-des-flamboyants-reunion/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=allee-des-flamboyants-reunion Mon, 14 Oct 2024 05:26:20 +0000 https://carbonlife.fr/?p=15354 la Plus belle allée des Flamboyants de La Réunion 31 Teq/CO2 en 5 ans Avec ses 31 tonnes de CO2 absorbées et séquestrées tous les 5 ans, la plus belle allée des Flamboyants de La Réunion est un Puits de carbone organique d’exception, classée au Conseil d’Architecture d’Urbanisme et de l’Environnement (CAUE). Bien que majoritairement composé […]

The post Allée des Flamboyants – Réunion first appeared on Carbonlife.

]]>

la Plus belle allée des Flamboyants de La Réunion

31 Teq/CO2 en 5 ans

Avec ses 31 tonnes de CO2 absorbées et séquestrées tous les 5 ans, la plus belle allée des Flamboyants de La Réunion est un Puits de carbone organique d’exception, classée au Conseil d’Architecture d’Urbanisme et de l’Environnement (CAUE).

Bien que majoritairement composé de Flamboyants (Delonix regia) qui en forment l’allée, le site abrite également une essence endémique des Mascareignes en danger critique d’extinction : le Benjoin (Terminalia bentzoe).

Les arbres majestueux qui comptent l’allée servent d’habitat et de garde-manger à une importante variété d’espèces comme l’oiseau Bellier (Ploceus cucullatus), le Papangue (Circus maillardi) ou encore l’Endormi (Furcifer pardalis).

§1- La plus belle allée des Flamboyants de l’île de La Réunion

L’allée des Flamboyants se situe à la Ravine des cabris, dans le Sud de l’île de La Réunion. En bleu, la zone quantifiée d'une surface de 0,9 hectare.

Arbre chatoyant, le Flamboyant (Delonix regiaest reconnu par les scientifiques comme étant l’une des dix espèces les plus captatrices de carbone en région tropicale et subtropicale (Ragula, 2020).  Cependant, les caractéristiques de cet arbre dépassent l’attendue atténuation des changements climatiques.  En effet, si cette essence est mise à nue du fait qu’elle perde toutes ses feuilles en hiver, elle déploie néanmoins ces artifices durant l’été en se parant de fleurs d’un rouge vif et intense d’où elle tire son nom. 

Parce qu’il fleurit pendant la période des fêtes à La Réunion, le Flamboyant tient une place à part dans le cœur des Réunionnais.  Synonyme de festivités, la floraison du Flamboyant coïncide avec la venue des letchis tout autant rouges.  Rouges, comme les éruptions du piton de la Fournaise.  Du fait qu’il symbolise le bonheur, la chaleur et l’abondance, le Flamboyant est un emblème de l’île de La Réunion et reste ancré dans la culture réunionnaise.

Un seul arbre fait déjà forte impression.  Imaginez alors une allée d’une centaine de spécimens pour vous dépeindre le tableau du site…

La CAUE a vu juste en classant la plus belle allée des Flamboyants de l’île en qualité d’arbres remarquables, une reconnaissance bien venue.

La Réunion est une aquarelle où figure le Flamboyant.  Indéniablement, cette allée d’une centaine de Flamboyants revêt une dimension culturelle et patrimoniale hors du commun.

§2- L’allée des Flamboyants, une symphonie de couleurs

Endormi Caméléon
L'Endormi, le Caméléon endémique de La Réunion.

Majestueux, les Flamboyants en présence s’imposent de leurs troncs impressionnants qui dépassent parfois les 2 mètres de circonférence.  On note aussi la présence de Benjoins, une espèce endémique des Mascareignes en danger d’extinction.  Bercée par les Alizées qui font onduler les champs de canne environnants, l’allée des Flamboyants sert de lieu d’habitat à de nombreuses espèces animales comme le Tisserin (Ploceus cucullatus) que l’on nomme aussi « oiseau Bellier ».  Indéniable architecte, cet oiseau est connu pour tisser des nids suspendus aux branches en forme de boule.  Non loin de là, une ravine abrite le célèbre Papangue (Circus maillardi), le rapace endémique de l’île de La Réunion.  Également endémique, l’Endormi ou Caméléon circule nonchalamment d’arbres en arbre (Furcifer pardalis).

Au détour du rouge des Flamboyants, du bleu de l’océan Indien, du vert des champs de canne, du jaune des Tisserins et du mariage de ces aquarelles par l’Endormi, l’allée des Flamboyants exulte en une symphonie de couleurs.  Véritable trésor biologique, le site peut s’enorgueillir de faire partie du patrimoine commun de la nation générant des services écosystémiques à valeur d’usage (art. L. 110-1, Code de l’env.).

En ce sens, ce décor de carte postale peut être considéré à juste titre comme un corridor de Biodiversité qu’il convient de valoriser et de protéger afin que les générations présentes et futures puissent – elles aussi – contempler et profiter des bienfaits et services environnementaux produits par le site.

§3- Parrainage de l’allée des Flamboyants

Allée des Flamboyants
Puissant Puits de carbone organique, le Flamboyant déploie ses couleurs chatoyantes durant l’Été austral.

Au-delà de la captation et de la séquestration en CO2 évaluée à 31 Teq/CO2 en 5 ans, le site présente une portée patrimoniale exceptionnelle.  À travers cette allée Flamboyante, c’est tout le patrimoine réunionnais qui est représenté dans sa dimension culturelle et générationnelle.  Pour cette raison, le prix minimum de la Teq/CO2 demandée est de 1.000 euros la Teq/CO2.

Le contrat de parrainage proposé pour valoriser et protéger l’allée des Flamboyants est appelé Paiement pour Services Écosystémiques dit « contrat PSE ».  Si cette contractualisation environnementale vise à rémunérer le titulaire du bien, elle engage néanmoins ce dernier par des obligations. 

À l’instar d’un sportif qui valorise et finance ses exploits par un sponsor, les biens environnementaux peuvent tout autant être parrainés par des entreprises.  Au regard du caractère exceptionnel endossé par l’allée des Flamboyants, l’entreprise parraine profitera de bénéfices substantiels en matière d’image et de notoriété propre à améliorer sa politique de Responsabilité Sociale en Entreprise (RSE).  En qualité de Puits de carbone organique extraordinaire, le contrat de parrainage PSE de ce lieu coche la plupart des critères de performance Environnementaux, Sociaux et de Gouvernance (ESG, Règlement 2020/852).  Pour faire valoriser ce parrainage au reporting extrafinancier (art. L. 225-102-1, Code de Commerce), Carbonlife propose un dispositif d’accompagnement propre à authentifier la démarche responsable et éthique de l’entreprise parraine.  Compris dans les stipulations du contrat de parrainage PSE, ce dispositif vise également à confirmer la démarche vertueuse du projet en gratifiant l’intégralité des parties prenantes.

The post Allée des Flamboyants – Réunion first appeared on Carbonlife.

]]>
Le mariage de la lutte climatique à la lutte contre l’érosion de la Biodiversité par les Puits de carbone https://carbonlife.fr/recherches-puits-de-carbone/sciences/le-mariage-climat-biodiversite-par-les-puits-de-carbone/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=le-mariage-climat-biodiversite-par-les-puits-de-carbone Mon, 30 Sep 2024 08:17:16 +0000 https://carbonlife.fr/?p=15031 Le mariage de la lutte climatique à la lutte contre l’érosion de la Biodiversité par les Puits de carbone Par Frédéric Dietrich – 30/09/2024. Calculateur (Teq/CO2) Intuitivement, nous le savons sans que nous puissions poser des mots dessus.  Oui, il y a bien un lien entre le Climat et le Biodiversité. Malheureusement, si l’intuition est […]

The post Le mariage de la lutte climatique à la lutte contre l’érosion de la Biodiversité par les Puits de carbone first appeared on Carbonlife.

]]>

Le mariage de la lutte climatique à la lutte contre l’érosion de la Biodiversité par les Puits de carbone

Par Frédéric Dietrich – 30/09/2024.

Intuitivement, nous le savons sans que nous puissions poser des mots dessus.  Oui, il y a bien un lien entre le Climat et le Biodiversité. Malheureusement, si l’intuition est là pour nous éclairer vers ce lien, ce dernier peine à être formulé clairement.  Quel est ce chainon manquant entre le climat et la Biodiversité ? Devant nos yeux depuis fort longtemps, ce lien existe bel et bien.  Il peut être consacré par une seule notion : les Puits de carbone.  Tant attendu, ce lien peut être explicité en sciences.  Bien que les émissions anthropiques de gaz carbonés soient responsables des changements climatiques constatés, il demeure en parallèle que l’atome de carbone est le principal matériau de la Vie.  En clair, la Vie est un Puits de carbone.  En conséquence, valoriser et protéger les Puits de carbone, c’est marier la lutte climatique à la lutte contre l’érosion de la Biodiversité.  Explications à suivre sur ce chainon manquant tant désiré !

Le mariage Climat Biodiversité par les Puits de carbone

L’augmentation de la concentration de CO2 atmosphérique se conjugue à la perte en Biodiversité

Depuis le début de l’ère industrielle, les émissions par les sources de gaz à effet de serre notamment carbonés ont été libérées dans l’Atmosphère.  La concentration de CO2 dans l’Atmosphère a augmenté, en passant de 280 à près de 420 particules par million (Hoffman, 2009).  Les effets des changements climatiques sont désormais tangibles.  Parmi les faits palpables démontrant l’effectivité des changements climatiques, on note cette redoutable remontée du niveau marin (relatif) qui augmente en moyenne de 3 mm par an (TOPEX/Poseidon, Jason-1, Jason-2, Jason-3 entre 1992 et 2016).

Côté Biodiversité, le constat n’est pas plus reluisant. Près de 69 % des espèces sauvages auraient déjà disparu en 50 ans (Mcrae, 2017).  À défaut de ne pouvoir s’adapter rapidement au dérèglement climatique, de nombreuses espèces s’éteignent dans l’anonymat, ce qui représente une perte irréversible pour les générations présentes et futures.  Cette extinction de masse est d’une telle ampleur qu’elle pourrait prononcer l’avènement d’une nouvelle ère géologique : l’anthropocène (Crutzen, 2019).

L’Être et la manifestation de l’Être, deux objets de droits différents, mais intriqués

Les Puits de carbone organiques sont une chose multiple, démembrés en deux objets distincts (Dietrich, 2022).

Le premier objet procède de ce que nous appellerons l’« Être », le Vivant qui construit sa structure physique à partir du carbone.  Compte tenu du fait que la Vie fonde son corpus à partir du carbone, l’Être se comprend comme un réservoir qui stocke le carbone.

Le second objet retourne de ce que nous nommerons la « manifestation de l’Être », soit l’expression de la Vie dans la matière.  Pour que la Vie forme sa matière physique, il est alors nécessaire qu’un mécanisme vienne absorber le carbone au préalable.  Manifestation de l’Être dans la matière, ce mécanisme n’est autre que le processus des Puits de carbone.

Alors que le réservoir des Puits de carbone organiques se distingue clairement de son processus, il est quand même à noter que c’est le réservoir qui génère le processus.  Sans réservoir pas de processus, sans l’Être pas de manifestation de l’Être.  Le réservoir a donc la primauté sur le processus qu’il produit, tout comme le pommier prévaut sur ses pommes (Robinne, 2003). 

Partant de ce constat millénaire, le droit Romain consacre ce lien hiérarchique entre la chose principale ou frugifère (le réservoir) qui prédomine face à la chose accessoire ou ses fruits (le processus).

En valorisant le processus, nous atténuons les changements climatiques, en protégeant le réservoir, nous luttons contre l’érosion de la Biodiversité

Les Puits de carbone sont donc fragmentés en deux objets dits « de droits ».

Le processus, d’une part, va absorber – directement ou indirectement – le carbone atmosphérique.  Il est générépériodiquement et régulièrement par le réservoir, la plupart du temps, sans altération de sa substance.  En valorisant le processus des Puits de carbone organiques, nous atténuons les effets des changements climatiques. 

Le réservoir d’autre part qui, lui, va séquestrer et stocker le carbone absorbé par le processus pour former sa structure physique.  En protégeant les Puits de carbone organiques, nous luttons contre l’érosion de la Biodiversité.

En schématisant, le carbone piégé par le Vivant représente autant de carbone qui ne se retrouve pas sous forme de gaz dans l’Atmosphère.

En définitive, le caractère démembré des Puits de carbone leur confère cette capacité hors norme capable de conjuguer la lutte climatique à la lutte contre l’érosion de la Biodiversité.

La gouvernance des Puits de carbone par la valorisation du processus conditionnée à la protection du réservoir

Fragmentés, les Puits sont une chose démembrée en deux objets : le processus qui atténue les effets des changements climatiques et le réservoir où siège la Vie qui construit sa structure physique par le carbone.  Il est alors important que les Puits de carbone s’inscrivent dans un mode de gestion différencié, mais fondé sur un lien hiérarchique permettant d’une part, la valorisation du processus et, d’autre part, la protection du réservoir. Comment y parvenir ?

Conditionné par le droit de propriété, le régime des fruits permet cet exploit (Jaoul, 2014).  En effet, il prévoit la jouissance et l’usage du processus (la chose accessoire) qui se trouvent valorisés sous condition de protection de sorte qu’il n’y ait pas d’altération de la substance du réservoir (la chose principale). En référence aux prérogatives du droit de propriété, l’usage (usus) et la jouissance (fructus) conditionnent aussi la disposition de la chose (abusus).  Par ce régime, il est alors envisageable de marier la lutte climatique à la lutte contre l’érosion de la Biodiversité.

Reste à trouver un champ d’expression capable d’endosser un tel objectif.  Le droit de l’environnement et son contrat environnemental seront alors le fer de lance qui permettront dans les faits de réaliser cette tant attendue entreprise.

Références

CRUTZEN P., « La géologie de l’humanité : l’Anthropocène », Ecologie politique, 34, no 1, Presses de Sciences Po, 2007, p. 141‑48.

DIETRICH F., Entrée « Puits de carbone », in TORRE-SCHAUB M., JÉZÉQUEL A., LORMETEAU B. et MICHELOT A., Dictionnaire Juridique du Changement Climatique, Mare & Martin, coll. « Collection de l’Institut des sciences juridique et philosophique de la Sorbonne », vol. 69, 2022, p. 459-60.

HOFMANN D.J., BUTLER J.H. et TANS P.P., « A new look at atmospheric carbon dioxide », Atmospheric Environment, 43, no 12, Elsevier, 2009, p. 2084‑86.

JAOUL M., La notion de fruits : étude de droit privé, Th. Montpellier I, 2014.

MCRAE L., DEINET S. et FREEMAN R., « The diversity-weighted living planet index : controlling for taxonomic bias in a global biodiversity indicator », Plos one, 12, no 1, Public Library of Science San Francisco, CA USA, 2017, p. 20.

ROBINNE S., Contribution à l’étude de la notion de revenus en droit privé, Presses universitaires de Perpignan, 2003.

The post Le mariage de la lutte climatique à la lutte contre l’érosion de la Biodiversité par les Puits de carbone first appeared on Carbonlife.

]]>
Puits de carbone, politique RSE et critères ESG https://carbonlife.fr/recherches-puits-de-carbone/economie/puits-de-carbone-politique-rse-et-criteres-esg/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=puits-de-carbone-politique-rse-et-criteres-esg Mon, 30 Sep 2024 07:26:03 +0000 https://carbonlife.fr/?p=14990 Puits de carbone, politique RSE et critères ESG Par Frédéric Dietrich – 30/09/2024. Calculateur (Teq/CO2) Dans ses derniers développements normatifs, le droit impose aux entreprises la prise en compte des dommages extérieurs qu’elles commettent sur la société civile et l’environnement dans leur système financier.  La publication d’information extra-financière est maintenant rendue obligatoire pour nombre de […]

The post Puits de carbone, politique RSE et critères ESG first appeared on Carbonlife.

]]>

Puits de carbone,
politique RSE et critères ESG

Par Frédéric Dietrich – 30/09/2024.

Dans ses derniers développements normatifs, le droit impose aux entreprises la prise en compte des dommages extérieurs qu’elles commettent sur la société civile et l’environnement dans leur système financier.  La publication d’information extra-financière est maintenant rendue obligatoire pour nombre de sociétés, notamment celles cotées.  Boussole de la Responsabilité Sociale en Entreprise (RSE), les critères Environnementaux et Sociaux de Gouvernance (ESG) servent dorénavant de grille d’évaluation.  Les Puits de carbone figurent en bonne place de ces critères, car ils conjuguent les intérêts environnementaux aux intérêts climatiques.  Mais dans les faits, la RSE sous critères ESG reste encore largement dominée par un droit volontaire (soft law), sans réelles sanctions juridiques.  Cependant, si l’on voit alors fleurir un nombre impressionnant de reportings extra-financiers largement biaisés, les entreprises devraient se détourner de tout laxisme.  Dorénavant, en matière de RSE, c’est la finance qui sanctionne.

Puits de carbone, RSE et critères ESG

La double origine de la Responsabilité Sociale en Entreprise (RSE)

La RSE a une double histoire, ou plutôt une double origine. 

De tradition philanthropique, la première origine date des années 1950 et se fonde sur l’adage selon lequel « ceux qui ont reçu doivent donner » (Bowen, 2013).  Cette approche plaide alors pour que s’organise une répartition équitable des richesses produites.  Sa vocation s’inscrit alors dans une démarche sociale propre à garantir le maintien de l’ordre public.

Constitutive aux multiples catastrophes industrielles des années 1980, la seconde origine de la RSE fait suite au Rapport Brundtland de 1987.  Fortement influencées par l’approche malthusienne (Malthus, 1798), les conclusions de ce rapport introduisent un développement économique qui « répond aux besoins des générations du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs ».   Le sommet de Johannesburg 2002 consolidera les bases de ce que l’on nomme aujourd’hui le développement durable.

Dans les deux cas, l’objectif de la RSE vise à intégrer, dans le bilan des entreprises, les nuisances extérieures – directes ou indirectes – qu’elles provoquent. 

Objet de la RSE : Internaliser les externalités

De l’effondrement du Puits-Biodiversité aux plastiques qui polluent le Puits-Océan, de la destruction du Puits-Forêt par la déforestation ou par le changement d’affectation des terres à la stérilisation du Puits-Sol par anthropisation : l’industrie cause des dommages, parfois irréversibles, aux Puits que l’on nomme les « externalités ».  Toutes ces externalités nuisent au renforcement des Puits de carbone.  Or, malgré le coût environnemental et sociétal qu’elles représentent, les externalités ne sont pas prises en compte dans le bilan comptable des entreprises.   Le célèbre économiste Ronald Coase pose alors le constat selon lequel l’activité des entreprises fait supporter des nuisances sans compenser les préjudices subis par les parties prenantes (Coase, 1988).

Constatant ces faits regrettables, la RSE a réorienté ses ambitions en faisant supporter aux entreprises les dommages qu’elles causent à l’environnement, au climat et à la société civile dans leurs systèmes financiers.  Ce mode de gouvernance se nomme « l’internalisation des externalités ».  En clair, le « fondement de la RSE réside dans la prise en charge de la part des entreprises des externalités qu’elles produisent » (Crouch, 2006).  En matière de RSE, l’évaluation des performances d’une entreprise se fonde désormais sur le degré d’internalisation des externalités. 

Les critères Environnementaux et Sociaux de Gouvernance (ESG), comme grille d’évaluation de la RSE

Pour évaluer les performances RSE en entreprise et pour internaliser correctement les externalités, il était nécessaire de se fonder sur des critères factuels. 

Le droit européen a alors largement contribué à clarifier les critères propres à évaluer la performance RSE d’une entreprise par la taxonomie verte (Règlement 2019/2088).  Cette dernière sera le fondement des critères Environnementaux et Sociaux de Gouvernance (ESG) dénommés les critères ESG.  Largement inspiré par les Objectifs du Développement Durable, le droit communautaire impose la publication d’informations aux entreprises en vertu des critères ESG.

Cependant, si ce Règlement énumère les critères ESG propres à mesurer la performance des entreprises en RSE, il reste encore trop flou et évasif sur les évaluations qualitatives et quantitatives desdits critères.  Une clarification s’imposait alors.

En remplacement du Règlement précité, un second Règlement 2020/852 fixe les indices visant à apprécier les critères ESG.  Parmi les critères devant être versés au reporting extra-financier, on compte les objectifs environnementaux comme : l’atténuation et l’adaptation aux CC, la transition vers l’économie circulaire, la réduction de la pollution et la protection de la Biodiversité.  Chacun de ces objectifs s’accompagne d’indicateurs variés comme la labélisation de certaines activités, le devoir de publication d’informations, l’utilisation de produits naturels dans la conception des produits ou encore le recyclage des déchets favorable à l’économie circulaire.  Dans le cadre de l’atténuation du changement climatique, les Puits de carbone se sont alors frayé une place de choix dans l’appréciation des critères ESG. Dorénavant, il est attendu des sociétés qu’elles améliorent « l’absorption de gaz à effet de serre, y compris par des innovations en matière de processus ou de produit », notamment « en renforçant les Puits de carbone » (art. 10§1-f). 

C’est par la sorte que les Puits de carbone se sont invités à titre d’indice de performance en qualité de politique RSE.  Nous le rappelons, la Vie est un Puits de carbone.  Puisqu’ils allient de concert les considérations environnementales et climatiques, les Puits de carbone cochent donc les cases de plusieurs critères ESG, ce qui plaide en faveur de leurs renforcements.

La portée coercitive de la RSE par la finance

En vertu du principe de l’effet direct du droit communautaire, les Règlements européens précités n’ont pas besoin d’être transposés en droit français.  Au titre de l’article 288 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, les États membres sont tenus de les appliquer directement.  Historique, l’estimation de l’impact des entreprises sur la société civile, sur l’environnement et sur le climat par un document s’est manifestée avant les deux Règlements précités.  Cette estimation le fut par la Directive 2014/95/UE, laquelle se devait d’être transposée en droit français.

À l’occasion de la Loi 2017-399 relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre, l’article L. 225-102-1 du Code de Commerce transpose cette Directive en imposant que soit incluse une déclaration de performance extra-financière dans le rapport de gestion de certaines entreprises.  Sont concernées par cette obligation, les entreprises comptant 20 millions d’euros de bilan total ou 40 millions d’euros pour le montant net du chiffre d’affaires, ou encore les groupes dont le nombre d’employés est d’au moins 500 (art. R. 22-10-29, Code de Commerce). 

Cependant, malgré cette apparente coercition, les normes relatives à la RSE restent de la soft law, c’est-à-dire un droit incitatif, mais mou.  En effet, si les actions en faveur de l’environnement peuvent être valorisées par un regain de notoriété, les sanctions de droit commun infligées en cas d’inaction restent négligeables, voire inexistantes.

Pourtant, les entreprises devraient veiller à ne pas être laxistes dans l’élaboration de leur politique RSE dont dépendront leurs reportings extra-financiers.  Les actionnaires, courtiers et gérants de portefeuilles scrutent attentivement les performances RSE des entreprises en rapport avec les critères ESG.  Gare aux entreprises qui se monteraient laxistes ou qui falsifieraient leurs reportings, car les reports des portefeuilles sont lourds de conséquences.  De fil en aiguille, la finance et ses acteurs sont en mesure d’infliger des sanctions de nature à faire corriger ou à faire effondrer un titre en bourse : la plus redoutée des sanctions pour une entreprise cotée.  C’est bien là l’ironie du sort : en matière de RSE, c’est la finance qui sanctionne.

Références

BOWEN H., Social responsibilities of the businessman, University of Iowa Press, 2013.

COASE R.H., The firm, the market, and the law, University of Chicago Press, 1988.

CROUCH C., « Modelling the Firm in its Market and Organizational Environment : Methodologies for Studying Corporate Social Responsibility », Organization Studies, 27, no 10, 2006, p. 1533‑51.

MALTHUS T.-R., Essai sur le principe de population, Londres, Institut national d’études démographiques, 1798.

VALIORGUE B. et DAUDIGEOS T., « L’internalisation des effets externes négatifs est-elle possible dans le cadre de la RSE ? », dans 3ème Séminaire de recherche « Responsabilité Sociale de l’Entreprise » et des Marchés, 2008, p. 14.

The post Puits de carbone, politique RSE et critères ESG first appeared on Carbonlife.

]]>
Puits de carbone, régime des fruits et droit de propriété https://carbonlife.fr/recherches-puits-de-carbone/droit/regime-des-fruits/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=regime-des-fruits Tue, 24 Sep 2024 07:30:13 +0000 https://carbonlife.fr/?p=14833 Puits de carbone, régime des fruits et droit de propriété Par Frédéric Dietrich – 24/09/2024. Calculateur (Teq/CO2) Les puits de carbone organiques regroupent trois objets de droits : le réservoir, le processus et le temps de résidence.  Compte tenu de cela, la quête d’un régime juridique devrait, en tout état de cause, conjuguer l’intégralité de ces […]

The post Puits de carbone, régime des fruits et droit de propriété first appeared on Carbonlife.

]]>

Puits de carbone,
régime des fruits et droit de propriété

Par Frédéric Dietrich – 24/09/2024.

Les puits de carbone organiques regroupent trois objets de droits : le réservoir, le processus et le temps de résidence.  Compte tenu de cela, la quête d’un régime juridique devrait, en tout état de cause, conjuguer l’intégralité de ces trois objets.  Du point de vue scientifique, il est à noter qu’il existe un lien d’interaction entre deux de ces objets.  En effet, les processus de photosynthèse, de dissolution des gaz partiels et d’altération des silicates sont générés par le réservoir, périodiquement et régulièrement, sans altération de la substance dudit réservoir.  À cela s’ajoute le fait que le processus des Puits de carbone organiques est le service écosystémique de régulation du climat.  L’ensemble de ces éléments concordants semble indiquer que les puits adhèrent au régime des fruits.  En conséquence de ce régime consacré, les puits de carbone obéissent au droit de propriété.  Jadis absolu, ce droit ancestral et mature est devenu relatif.  Par la relativité du droit de propriété, la protection de la Vie par les Puits de carbone est alors largement envisageable.

Droit des Puits de carbone et régime des fruits

Le processus généré périodiquement et régulièrement par le réservoir, sans altération de sa substance

En vertu d’une toute nouvelle définition doctrinale, les puits de carbone, organiques ou artificiels, fédèrent 3 objets de droits que sont le réservoir, le processus et le temps de résidence (Dietrich, 2022).  Cependant, puisqu’il porte de sérieuses imperfections, le droit du climat n’est pas en mesure de faire endosser aux puits un régime juridique solidement consacré. 

Constatant cela, nous nous sommes tournés vers les sciences afin qu’elles nous indiquent les critères qui régissent les interactions entre les objets de droits. Il apparaît alors très clairement que les processus de photosynthèse, de dissolution des gaz partiels et d’altération des silicates sont engendrés par le réservoir.  En effet, c’est bien l’arbre ou le Puits-Forêt qui en qualité de réservoir produit la photosynthèse, en autres, par ses feuilles.  De même, le Puits-Océan et le Puits-Sol génèrent respectivement les processus de dissolution des gaz partiels et d’altération des silicates.  En référence à de solides positionnements scientifiques, les objets de droits des Puits de carbone obéissent à des critères communs qui sont l’engendrement, la périodicité et la régularité.  Des critères qui trouvent leur destinée en droit…

Le processus des Puits de carbone compris comme service écosystémique alors qualifié de fruits par la doctrine

À l’instar du Millennium Ecosystem Assessment (MEA, 2005), il est avéré que le processus des Puits de carbone organiques relève de ce que l’on nomme un service écosystémique, en l’occurrence, le service de régulation du climat par la captation de carbone atmosphérique. 

Brillamment, la doctrine s’est alors penchée sur les probables qualifications juridiques des services écosystémiques (Beaussonie, 2018).  Les qualifications retenues sont : les fruits, les servitudes administratives, les mesures de police environnementale ou les obligations réelles.  Or, à y regarder de plus près, il semble qu’une regrettable confusion ait conduit à qualifier ce qui procède de la qualification du réservoir au détriment de ce qui retourne du processus.  Dit autrement, les servitudes administratives, les mesures de police environnementale ou les obligations réelles relèvent du réservoir des Puits de carbone et non du processus.  La seule qualification qui corresponde à l’objet de droits relatif au processus reste celle des fruits. 

D’autres membres éminents de la doctrine n’ont pas fait cette regrettable confusion et ont immanquablement qualifié les services écosystémiques, dont le processus des Puits de carbone, de fruits (Vanuxem, 2017 ; Billet 2018).

Les Puits de carbone, appropriés et appropriables, adhèrent au régime juridique des fruits

Le ciel est bleu, les oiseaux volent, et bien évidemment, le droit de l’environnement s’est inspiré et s’inspire encore des sciences pour se construire et se structurer en vertu des paramètres de prédictibilité et de reproductibilité.  Les Puits de carbone sont à la fois cette notion qui fait converger le droit et les sciences.  Or, ainsi que nous l’avons signifié plus haut, le processus des puits de carbone est généré périodiquement et régulièrement par le réservoir.  En référence à la tradition civiliste, les choses qui obéissent aux critères d’engendrement, de périodicité et de régularité relèvent de la notion de fruits (Jaoul, 2014).

En droit Romain, les fruits (ou le processus) sont la chose dite accessoire, cette dernière est produite par la chose dite principale (ou le réservoir).  Le droit possède aussi sa logique.  Selon l’expression consacrée, la chose accessoire et sa qualification juridique suivent la qualification de la chose principale (accessorium sequitur principale).  En clair, la qualification du processus va inspirer celle du réservoir alors qualifié de chose frugifère, la chose matricielle apte à produire des fruits. 

En conséquence, les puits de carbone – appropriables et appropriés – adhèrent pleinement au régime des fruits, un régime qui correspond aussi à la qualification des services écosystémiques.  En termes de catégorie juridique, les Puits de carbone vivants produisent des fruits dits « organiques » dont ils tirent désormais le nom : les Puits organiques, naturels ou industriels (art. 582, Code civil).  Quant aux puits artificiels, ils retournent d’une production de fruits dits « civils » (art. 583, Code civil).  En somme, le régime des fruits recouvre par ses catégories l’intégralité des types de puits de carbone.

Outre, le fait que le régime des fruits ait cette admirable faculté à conjuguer les deux objets de droits des puits de carbone (le processus et le réservoir), il n’élude pas pour autant le dernier objet de droits qu’est le temps de résidence.  La gestion « en bon père de famille » de la chose frugifère confère au régime des fruits la durabilité chère au principe des équités générationnelles.

Enfin et au titre de la compensation climatique, les émissions par les sources, quotas ou crédits carbone, obéissent au régime des biens.  Eu égard à la neutralité climatique prévoyant la compensation entre les sources et les « processus » des puits, il est attendu que cette compensation soit rendue effective par un régime juridique commun entre deux objets fongibles (art. 587 et art. 1892, Code civil), c’est à dire de compensation interchangeable.  D’un point de vue normatif, les émissions par les sources, crédits et quotas carbone, obéissent au régime des biens. Or, seule la qualification de fruits fait entrer le « processus » dans le régime des biens.

La relativité du droit de propriété pour la protection de la Vie

Le fait que les puits de carbone, qu’ils soient appropriés ou appropriables, adhèrent au régime des fruits, suppose leur gouvernance par le droit de propriété.  La Vie étant un Puits de carbone, il est alors nécessaire de se demander si le droit de propriété est en mesure de protéger le Vivant.

Une formule doctrinale résume assez clairement l’évolution de ce droit de propriété : « la propriété a été bourreau de la nature, avant [que] d’en être victime » (Grimonprez, 2015).  D’un droit absolu (art. 544, Code civil), le droit de propriété est devenu ce droit complètement relatif (Scaboro, 2013). D’origine jurisprudentielle, cette relativité est fondée par deux théories : la théorie des troubles anormaux de voisinage et la théorie de l’abus de droit de propriété.  Inspirée de ces deux théories, une pléthore de normes est venue amoindrir le dominium, notamment dans la gestion des biens environnementaux.  Dorénavant, la propriété s’exerce en considération de sa fonction sociale (erga omnes). Adaptée à l’environnement, cette fonction sociale vise au maintien de l’ordre public écologique lui-même fondé sur la pacification des relations entre l’Homme et la Nature (Kiss, 2005).  Une pacification propre à créer cette symbiose tant désirée entre les générations présentes et les générations futures.

En marge des puits de carbone appropriables et appropriés qui ont su trouver leur régime, il demeure les puits strictement inappropriables dont la qualification est celle relative à la chose commune (art. 714, Code civil).  Tout autant Puits de carbone, la faune et la flore strictement protégées par les Conventions internationales (CITES, 1975), tout comme la Haute-mer (Convention de Montego Bay, 1982), ne sauraient correspondre au régime des fruits, mais au régime des communs

Le droit de propriété n’est plus un droit destructeur.  Cependant, il demeure une idée selon laquelle le retrait de ces Entités environnementales du droit de propriété plaide à leurs protections.  Pourtant, près de 69 % des espèces sauvages largement inappropriées auraient déjà disparu en 50 ans (Mcrae, 2017).  Ainsi que l’observe Aristote, « [l]’homme prend le plus grand soin de ce qui lui est propre, il a tendance à négliger ce qui est commun ». 

Les conclusions sont donc à nuancer.  Le droit de propriété n’est plus ce droit vulgaire et destructeur, il possède aussi des qualités propres à faire jaillir la protection de la Vie.  Il serait alors dommage de se priver de ce levier ancestral.

Références

BEAUSSONIE G., « La qualification juridique des services écosystémiques », Droit et ville, no 1, Cairn/Softwin, 2018, p. 119‑34.

BILLET P., « Considérations juridiques sur le service de pollinisation et services associés », In Des petits oiseaux aux grands principes” – Mélanges en hommage au Professeur Jean Untermaier, 2018, p. 53‑91.

DIETRICH F., Entrée « Puits de carbone », in TORRE-SCHAUB M., JÉZÉQUEL A., LORMETEAU B. et MICHELOT A., Dictionnaire Juridique du Changement Climatique, Mare & Martin, coll. « Collection de l’Institut des sciences juridique et philosophique de la Sorbonne », vol. 69, 2022, p. 459-60.

GRIMONPREZ B., « La fonction environnementale de la propriété », Revue trimestrielle de droit civil, 3, 2015, p. 539‑50.

JAOUL M., La notion de fruits : étude de droit privé, Th. Montpellier I, 2014.

KISS A., « L’ordre public écologique » in M.Boutelet & J.-C. Fritz (dir.), Bruxelles, Bruylant, 2005

MCRAE L., DEINET S. et FREEMAN R., « The diversity-weighted living planet index : controlling for taxonomic bias in a global biodiversity indicator », Plos one, 12, no 1, Public Library of Science San Francisco, CA USA, 2017, p. 20

SCABORO R., « Le droit de propriété, un droit absolument relatif », Droit et ville, no 76, 2013, p. 237‑55

VANUXEM S., « Les services écologiques ou le renouveau de la catégorie civiliste de fruits ? », McGill Law Journal, 62, no 3, 2017, p. 739‑76.

The post Puits de carbone, régime des fruits et droit de propriété first appeared on Carbonlife.

]]>
Le carbone, le matériau de la Vie essentiel au cycle du carbone https://carbonlife.fr/recherches-puits-de-carbone/sciences/carbone-vivant/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=carbone-vivant Sat, 21 Sep 2024 07:03:56 +0000 https://carbonlife.fr/?p=14651 Le carbone, le matériau de la Vie essentiel au cycle du carbone Par Frédéric Dietrich – 21/09/2024. Calculateur (Teq/CO2) Informé que les gaz à effet de serre – notamment carbonés – sont responsables des changements climatiques constatés, le grand public méconnaît souvent le caractère exceptionnel de l’atome de carbone.  Véritable brique du Vivant, le carbone […]

The post Le carbone, le matériau de la Vie essentiel au cycle du carbone first appeared on Carbonlife.

]]>

Le carbone,
le matériau de la Vie essentiel au cycle du carbone

Par Frédéric Dietrich – 21/09/2024.

Informé que les gaz à effet de serre – notamment carbonés – sont responsables des changements climatiques constatés, le grand public méconnaît souvent le caractère exceptionnel de l’atome de carbone.  Véritable brique du Vivant, le carbone est un atome dont les caractéristiques chimiques favorisent les constructions de molécules plus ou moins complexes.  Au sommet de cette complexité, nous retrouvons les acides aminés qui forment l’ADN du Vivant.  Compte tenu de cela, la Vie est donc la pièce maitresse du cycle du carbone. Lorsqu’elle est en bonne santé, la Biodiversité contribue alors à l’atténuation des changements climatiques.

Le carbone matériau du Vivant

L’atome de carbone comme brique de la Vie

Ainsi qu’en témoigne le tableau périodique de Mendeleïev (1905), notre univers fourmille d’atomes.  Selon leurs caractéristiques chimiques, les atomes sont capables de se lier entre eux par des liaisons appelées « liaisons covalentes ».  Celles-ci sont en quelque sorte les « petites mains » des atomes qui viendront se serrer entre elles.  Plus le nombre de petites mains est élevé, plus l’atome est susceptible de multiplier les liaisons pour former des molécules plus ou moins complexes.  Le nombre maximum de liaisons covalentes ou de petites mains est de quatre.  En minorité, ces atomes spéciaux et insolites sont appelés atomes tétravalents.  Parmi eux, on compte : le carbone, le silicium, le soufre et le manganèse.  En vertu de leurs capacités à s’unir, les atomes tétravalents sont privilégiés dans la construction de molécules plus complexes comme les acides aminés, lesquels forment les briques de la Vie.  Dans l’univers, une poignée d’atomes possède ces caractéristiques fabuleuses : le carbone est l’un d’eux.

La Vie construit sa structure physique principalement à partir de l’atome de carbone

Mais la capacité surprenante du carbone ne s’arrête pas là.  Si le carbone revêt effectivement la possibilité de se lier par quatre points d’ancrage différents, il est l’atome tétravalent qui endosse la plus faible masse molaire (environ 12).  En bref, moins un atome a une masse molaire élevée, plus le Vivant va intégrer facilement cet atome à son corpus.  Pour quelle raison ? Pour prospérer, la Vie est soucieuse d’économiser son énergie.  Ce faisant, elle cherche toujours à optimiser ses forces pour garantir la vitalité de son métabolisme.  Garder un niveau d’énergie suffisant permet à la Vie de perdurer, de croître, de fructifier et d’engendrer. En clair, en construisant sa matière à partir du carbone, la Vie économise plus son énergie qu’elle n’aurait pu le faire avec un autre atome.

Est alors favorisé dans la construction du vivant, le carbone pour ses caractéristiques chimiques hors norme.  Cette loi physique de notre univers est immuable, à tel point qu’il y ait de forte chance pour que la Vie extraterrestre soit elle aussi composée de carbone (Henning et al., 1998). 

Pour ces raisons, le carbone est le matériau privilégié de la Vie

Le rôle de la Vie dans le cycle du carbone

En constituant sa matière à partir du carbone, le Vivant devient alors la pièce maîtresse des flux de matière, notamment par le cycle du carbone.  Le cycle du carbone se conçoit comme un collier constitué de plusieurs maillons.  Chacun de ces maillons forme un Puits de carbone

En référence au cycle du carbone qui forme le collier, le carbone transite alors de maillon en maillon, d’un Puits à un autre, de sorte que le carbone stocké dans un Puits soit appelé à migrer vers un homologue. 

Véritable brique de la Vie, une Biodiversité en bonne santé conditionne sa faculté à faciliter le transit du carbone.  Dans le cas contraire, c’est-à-dire lors de fortes atteintes à la Biodiversité, l’acheminement du carbone se trouve congestionné, voire bloqué.

Le carbone reconnu en qualité de matériau de la Vie par le droit européen

Après des années d’attente, les caractéristiques hors norme du carbone viennent enfin d’être admises, pour ne pas dire consacrées, en droit. En effet, ce fait scientifique a récemment été authentifié lors d’une Communication européenne remarquée traitant du « Cycle du carbone durable » (COM (2021) 450-451 final du 15 décembre 2021).  Or, un tel texte préfigure ou inspire bien souvent les futures Déclarations, Règlements (applicables directement et sans transposition par les États membres de l’UE) et Directives européennes (transposées ensuite dans les droits internes).  

Dès la première ligne, on peut lire : « [l]e carbone est l’atome de la vie ». 

Ce faisant, la présente Communication observe alors l’influence des CC sur la Biodiversité : « En conséquence, le climat mondial se réchauffe, la biodiversité disparaît, les océans s’acidifient et les phénomènes météorologiques extrêmes sont de plus en plus fréquents. À leurs tours, les cycles courts d[u] carbone entre la végétation et l’atmosphère sont perturbés et le niveau de la mer augmente en raison de l’incidence du changement climatique sur les terres, les forêts, les mers et la cryosphère ». 

De fil en aiguille, cette réalité scientifique permet d’avancer un autre constat qui nous tient à cœur, à savoir que les Puits de carbone marient la lutte climatique à la lutte contre l’érosion de la Biodiversité.

Bien évidemment, la conjonction de ces luttes comprend une portée générationnelle qu’il convient de souligner.

Références

COM (2021) 450-451 final du 15 décembre 2021, Des cycles du carbone durables.

DIETRICH F., dans TORRE-SCHAUB M., JÉZÉQUEL A., LORMETEAU B. et MICHELOT A., Dictionnaire Juridique du Changement Climatique, Mare & Martin, coll. « Collection de l’Institut des sciences juridique et philosophique de la Sorbonne », vol. 69, 2022, Entrée « Puits de carbone » p. 459-460.

HELIN T., SOKKA L., SOIMAKALLIO S. et al., « Approaches for inclusion of forest carbon cycle in life cycle assessment – a review », GCB Bioenergy, 5, 2013, p. 475‑486.

HENNING T. et SALAMA F., « Carbon in the Universe », Science, 282, American Association for the Advancement of Science, 1998, p. 2204‑2210.

MENDELEYEV D.I., The principles of chemistry, Longmans, Green, vol. 2, 1905.

The post Le carbone, le matériau de la Vie essentiel au cycle du carbone first appeared on Carbonlife.

]]>
Les imperfections du droit du climat dommageables aux Puits de carbone https://carbonlife.fr/recherches-puits-de-carbone/droit/imperfections-droit-du-climat/?utm_source=rss&utm_medium=rss&utm_campaign=imperfections-droit-du-climat Thu, 19 Sep 2024 07:54:16 +0000 https://carbonlife.fr/?p=14483 Les imperfections du droit du climat dommageables aux Puits de carbone Par Frédéric Dietrich – 19/09/2024. Calculateur (Teq/CO2) Comment expliquer que la notion de Puits de carbone soit si transparente en droit et demeure encore méconnue du grand public ?  Au travers de ces quelques lignes, nous proposons une hypothèse permettant d’expliquer cela.  Il semble en […]

The post Les imperfections du droit du climat dommageables aux Puits de carbone first appeared on Carbonlife.

]]>

Les imperfections du droit du climat
dommageables aux Puits de carbone

Par Frédéric Dietrich – 19/09/2024.

Comment expliquer que la notion de Puits de carbone soit si transparente en droit et demeure encore méconnue du grand public ?  Au travers de ces quelques lignes, nous proposons une hypothèse permettant d’expliquer cela.  Il semble en effet que le droit de climat soit empreint de quelques insuffisances dont les effets ont eu pour conséquence de disqualifier les Puits de carbone. Même infimes, comme les battements d’aile d’un papillon, ces imperfections ont eu pour conséquence de repousser les Puits de carbone loin du rivage de la consécration.  À l’instar du droit de propriété, tous les droits endossent des imperfections.  En palliant ces regrettables imperfections, le droit du climat pourrait très bien changer son fusil d’épaule en devenant un droit en mesure de marier la protection du climat à la protection de la Biodiversité.  Cependant, pour comprendre le fondement de ces insuffisances, il nous a été nécessaire d’entamer un indispensable voyage interdisciplinaire entre le droit, les sciences et l’économie.

Les imperfections du droit du climat

La neutralité carbone, ou la porte d’entrée des puits dans le droit du climat

Avant tout, il nous paraît important de définir ce qui est entendu par “droit du climat”.  Nous avons qualifié en qualité de « droit du climat » : les normes (internationales, européennes et internes), les éléments doctrinaux et la jurisprudence ayant trait au climat.  Alors que la Convention-cadre de 1992 à Rio est considérée comme l’année de naissance du droit du climat, la neutralité carbone a été et reste la porte d’entrée des puits de carbone dans ce droit.  Elle consiste en un équilibre entre les émissions par les sources (voitures, industries, etc) et les absorptions par les puits (Océan, Forêt, Sol, Biodiversité et technologies de captation ou puits artificiels).  Faisant de la neutralité carbone le point cardinal de la lutte climatique, l’équilibre entre les émissions par les sources et les absorptions par les puits a alors conquis l’intégralité de l’ordonnancement juridique (art. 4§1-a, CCNUCC 1992 ; art. 1, Règlement 2021/1119 ; art. L. 100-4-I-1°, Code de l’énergie).

Première imperfection :
l’amalgame du Vivant et de l’inerte par le terme « anthropique »

Si la première Convention du droit du climat consacrait le Vivant en prévoyant l’usage des Puits dit “naturels” dans la compensation relative à la neutralité carbone (art. 1§8, CCNUCC 1992), le Protocole de Kyoto a banni la Vie – qui n’ a pas recours à la main de l’Homme  – de la lutte climatique (Art. 3§3, Protocole de Kyoto 1997).  Désormais, les types de puits sollicités pour parvenir à l’équilibre avec les sources devront être « anthropiques ».  

Cependant, le terme anthropique est source d’un terrible amalgame.  En effet, il englobe à la fois ce qui est consécutif à une technologie humaine inerte (les technologies de captation aussi nommées « puits artificiels ») avec ce qui résulte de l’invention du Vivant fomenté par la main de l’Homme (l’agriculture ou encore les agroforesteries).  L’Anthropisation de la lutte climatique a alors fondu dans un même moule ce qui relève d’une technologie, avec ce qui procède du jeu de la Vie, certes orienté par l’Homme.  Pourtant, les sciences ne cessent d’affirmer et de réaffirmer que les Puits naturels absorbent et séquestrent plus du quart des émissions d’origine humaine (Friedlingstein, 2023).  Cela s’explique par le fait que le carbone soit le matériau du Vivant.

Sont alors écartés du droit, les Puits de carbone naturels tels que le Puits-Océan ou le Puits-Forêt, au profit des puits artificiels dont la rentabilité économique est largement décriée.  Quels en sont les effets ?  Dans sa gouvernance, le droit du climat prône le renforcement des puits de carbone, un renforcement qui plaide en faveur de l’émergence d’une probable valorisation et protection de la Vie.  Or, l’éviction des Puits naturels prive le Vivant de cette gouvernance.  En outre, se priver des Puits naturels rend intenable l’accomplissement de la neutralité carbone.  Une chose qu’a très bien comprise le droit européen qui, dans un récent Règlement, a réhabilité les Puits naturels dans le lutte climatique (art. 4§1, Règlement 2021/1119).  Que d’années perdues malgré cette tardive prise de conscience…

Seconde imperfection :
le démembrement des puits en deux objets de droits sans lien d’engendrement

En matière de puits de carbone, chaque discipline voit midi à sa porte.  Pour le droit, un puits est un processus qui absorbe le CO2 atmosphérique.  Mais pour les sciences, un puits est avant tout un réservoir qui stocke le carbone.  Dans cette dynamique, la communauté scientifique qualifie alors un puits au regard de son réservoir de référence qu’elle nomme respectivement Puits-Océan, Puits-Forêt, Puits-Sol et Puits-Biodiversité.  En droit de l’environnement, l’Océan, la Forêt, le Sol et la Biodiversité sont appréhendés en qualité d’Entités environnementales ou de chose dite matricielle.  En droit Romain, on parle de chose frugifère, une chose principale capable de générer périodiquement et régulière une chose accessoire, sans altération de sa substanceque l’on nomme : les fruits (Jaoul, 2019).  Partant de ce constat, le processus ne serait-il pas la chose accessoire du réservoir compris comme chose principale ?  Qui sont les processus des Puits de carbone au juste ?  Les sciences nous éclairent alors sur ces questionnements.  La photosynthèse, la dissolution des gaz partiels et l’altération des silicates sont les processus des Puits.  Ces derniers sont générés, périodiquement et régulièrement par le réservoir, sans altération de sa substance.  Le démembrement d’une chose matricielle, en une chose principale et une chose accessoire, est un classique du droit Romain.  Pour que le lecteur nous comprenne, procédons à une analogie où le réservoir et de son processus renverraient respectivement au pommier et à ses pommes.  Aussi vrai que le réservoir engendre le processus, le pommier génère les pommes.

Au titre du démembrement des puits de carbone, il est alors indispensable d’instruire le lien d’engendrement entre ces deux objets de droits en consacrant le fait que le réservoir génère le processus, tout comme le fait que le pommier produise des pommes.  Le droit du climat a donc commis une double imprudence.  Outre le fait qu’il a qualifié une chose matricielle par son accessoire (ce qui revient à qualifier un pommier de pommes), il a de surcroit éludé le lien d’engendrement entre le processus et le réservoir.  En conséquence, la hiérarchisation de ces deux objets de droits que sont le réservoir et le processus est impossible (Cottet, 2013).  Ce qui conduit à une gestion déséquilibrée de ces deux objets de droits.  Eu égard à la neutralité carbone, le processus est financiarisé à outrance en qualité de revenu par les crédits et quotas carbone (Robinne, 2003).  Quant au réservoir qu’il convient de renforcer, il est tout juste bon à stocker le carbone.  Or, sans réservoir, pas de processus.  C’est bien entendu le réservoir qui a la primauté et qu’il convient de protéger, en « bon père de famille », ceci afin de pouvoir bénéficier du processus ainsi généré.  Malheureusement, le droit du climat s’est enlisé dans ces préceptes en démembrant des puits de carbone en deux objets de droits, le tout sans lien d’engendrement. 

Troisième imperfection :
la financiarisation de la lutte climatique induisant la valorisation du Vivant à la hauteur de l’inerte, sans considération du facteur de rareté propre au fondement de l’offre et de la demande

Pour le droit, un puits est un processus qui se valorise sur les marchés financiers du carbone.  Au titre de la neutralité carbone, le processus des puits se compense avec les émissions par les sources suivant une cotation commune.  Pour rappel, les puits de carbone retournent de l’intervention du Vivant, quand les sources procèdent de la combustion d’énergie fossile procédant de l’inerte.  Ainsi, la neutralité carbone n’est rien de plus qu’une compensation entre le Vivant et l’inerte.  En dehors des questionnements éthiques que pose un tel mécanisme de compensation, un grave problème se pose.  Le combat de David contre Goliath.

Pour se fixer les idées, il faut près de 50 arbres moyens (puits) pour compenser les émissions d’une seule voiture (sources).  En matière d’abondance, les sources sont largement plus abondantes que les puits, ce qui conduit à un profond déséquilibre.  Sur le plan mondial, on compte 2 unités de source pour une unité de puits (Friedlingstein, 2023).  De même en France, il y a 24 unités de source pour une unité de puits (CITEPA, 2023).  Au niveau régional, il n’est pas rare que 10 unités de sources côtoient une seule unité de puits.  Impulsée par les marchés du carbone, la conversion en crédits et en quotas valorise, à la même hauteur, les sources et les puits, sans considération du critère de rareté.  Le critère de rareté demeure un socle en économie, car il sous-tend le totem de l’offre et de la demande (Smith, 1798 ; Walras, 1874 ; Ricardo, 1992 ; Mill 2011).  En substance, échanger une chose rare au même prix qu’une chose abondante contrevient aux règles économiques les plus élémentaires.  Pourtant, en financiarisant la lutte climatique sans considération du critère de rareté, en traitant le processus des puits en qualité de revenus financiers, en échangeant les puits vivants si rares en compensation des sources l’inerte si abondantes, le droit du climat s’est écarté des règles économiques les plus élémentaires.

Avec de tels boulets aux pieds, il n’est alors pas étonnant que les Puits de carbone demeurent dans l’ombre du droit du climat.  Compte tenu de cela, nous nous sommes alors tournés vers le droit de l’environnement et le droit de propriété pour valoriser et protéger les Puits de carbone organiques.

Références

CITEPA, « Gaz à effet de serre et polluants atmosphériques. Bilan des émissions en France de 1990 à 2022 », 2023, p. 575.

COTTET M., Essai critique sur la théorie de l’accessoire en droit privé, LGDJ, coll. « Bibliothèque de droit privé », Tome 544, 2013.

FRIEDLINGSTEIN P., O’SULLIVAN M., JONES M.W., ANDREW R.M., BAKKER D.C., HAUCK J., LANDSCHÜTZER P., LE QUÉRÉ C., LUIJKX I.T. et PETERS G.P., « Global carbon budget 2023 », Earth System Science Data, 15, no 12, Copernicus GmbH, 2023, p. 5301‑69.

JAOUL M., La notion de fruits : étude de droit privé, Th. Montpellier I, 2014.

MILL J.S., « De l’état stationnaire », Revue du MAUSS, 37, no 1, La Découverte, 2011, p. 419‑25.

RICARDO D., CONSTÂNCIO F.S. et SAY J.B., Des principes de l’économie politique et de l’impôt, Paris, GF-Flammarion, 1992.

ROBINNE S., Contribution à l’étude de la notion de revenus en droit privé, Presses universitaires de Perpignan, 2003.

SMITH A., Théorie des sentiments moraux, Paris, PUF, coll. « Léviathan », 1759.

WALRAS L., Éléments d’économie politique pure ou Théorie de la richesse sociale, Paris, Guillaumin, 1874.

The post Les imperfections du droit du climat dommageables aux Puits de carbone first appeared on Carbonlife.

]]>