Le carbone,
le matériau de la Vie essentiel au cycle du carbone

Par Frédéric Dietrich – 21/09/2024.

Informé que les gaz à effet de serre – notamment carbonés – sont responsables des changements climatiques constatés, le grand public méconnaît souvent le caractère exceptionnel de l’atome de carbone.  Véritable brique du Vivant, le carbone est un atome dont les caractéristiques chimiques favorisent les constructions de molécules plus ou moins complexes.  Au sommet de cette complexité, nous retrouvons les acides aminés qui forment l’ADN du Vivant.  Compte tenu de cela, la Vie est donc la pièce maitresse du cycle du carbone. Lorsqu’elle est en bonne santé, la Biodiversité contribue alors à l’atténuation des changements climatiques.

Le carbone matériau du Vivant

L’atome de carbone comme brique de la Vie

Ainsi qu’en témoigne le tableau périodique de Mendeleïev (1905), notre univers fourmille d’atomes.  Selon leurs caractéristiques chimiques, les atomes sont capables de se lier entre eux par des liaisons appelées « liaisons covalentes ».  Celles-ci sont en quelque sorte les « petites mains » des atomes qui viendront se serrer entre elles.  Plus le nombre de petites mains est élevé, plus l’atome est susceptible de multiplier les liaisons pour former des molécules plus ou moins complexes.  Le nombre maximum de liaisons covalentes ou de petites mains est de quatre.  En minorité, ces atomes spéciaux et insolites sont appelés atomes tétravalents.  Parmi eux, on compte : le carbone, le silicium, le soufre et le manganèse.  En vertu de leurs capacités à s’unir, les atomes tétravalents sont privilégiés dans la construction de molécules plus complexes comme les acides aminés, lesquels forment les briques de la Vie.  Dans l’univers, une poignée d’atomes possède ces caractéristiques fabuleuses : le carbone est l’un d’eux.

La Vie construit sa structure physique principalement à partir de l’atome de carbone

Mais la capacité surprenante du carbone ne s’arrête pas là.  Si le carbone revêt effectivement la possibilité de se lier par quatre points d’ancrage différents, il est l’atome tétravalent qui endosse la plus faible masse molaire (environ 12).  En bref, moins un atome a une masse molaire élevée, plus le Vivant va intégrer facilement cet atome à son corpus.  Pour quelle raison ? Pour prospérer, la Vie est soucieuse d’économiser son énergie.  Ce faisant, elle cherche toujours à optimiser ses forces pour garantir la vitalité de son métabolisme.  Garder un niveau d’énergie suffisant permet à la Vie de perdurer, de croître, de fructifier et d’engendrer. En clair, en construisant sa matière à partir du carbone, la Vie économise plus son énergie qu’elle n’aurait pu le faire avec un autre atome.

Est alors favorisé dans la construction du vivant, le carbone pour ses caractéristiques chimiques hors norme.  Cette loi physique de notre univers est immuable, à tel point qu’il y ait de forte chance pour que la Vie extraterrestre soit elle aussi composée de carbone (Henning et al., 1998). 

Pour ces raisons, le carbone est le matériau privilégié de la Vie

Le rôle de la Vie dans le cycle du carbone

En constituant sa matière à partir du carbone, le Vivant devient alors la pièce maîtresse des flux de matière, notamment par le cycle du carbone.  Le cycle du carbone se conçoit comme un collier constitué de plusieurs maillons.  Chacun de ces maillons forme un Puits de carbone

En référence au cycle du carbone qui forme le collier, le carbone transite alors de maillon en maillon, d’un Puits à un autre, de sorte que le carbone stocké dans un Puits soit appelé à migrer vers un homologue. 

Véritable brique de la Vie, une Biodiversité en bonne santé conditionne sa faculté à faciliter le transit du carbone.  Dans le cas contraire, c’est-à-dire lors de fortes atteintes à la Biodiversité, l’acheminement du carbone se trouve congestionné, voire bloqué.

Le carbone reconnu en qualité de matériau de la Vie par le droit européen

Après des années d’attente, les caractéristiques hors norme du carbone viennent enfin d’être admises, pour ne pas dire consacrées, en droit. En effet, ce fait scientifique a récemment été authentifié lors d’une Communication européenne remarquée traitant du « Cycle du carbone durable » (COM (2021) 450-451 final du 15 décembre 2021).  Or, un tel texte préfigure ou inspire bien souvent les futures Déclarations, Règlements (applicables directement et sans transposition par les États membres de l’UE) et Directives européennes (transposées ensuite dans les droits internes).  

Dès la première ligne, on peut lire : « [l]e carbone est l’atome de la vie ». 

Ce faisant, la présente Communication observe alors l’influence des CC sur la Biodiversité : « En conséquence, le climat mondial se réchauffe, la biodiversité disparaît, les océans s’acidifient et les phénomènes météorologiques extrêmes sont de plus en plus fréquents. À leurs tours, les cycles courts d[u] carbone entre la végétation et l’atmosphère sont perturbés et le niveau de la mer augmente en raison de l’incidence du changement climatique sur les terres, les forêts, les mers et la cryosphère ». 

De fil en aiguille, cette réalité scientifique permet d’avancer un autre constat qui nous tient à cœur, à savoir que les Puits de carbone marient la lutte climatique à la lutte contre l’érosion de la Biodiversité.

Bien évidemment, la conjonction de ces luttes comprend une portée générationnelle qu’il convient de souligner.

Références

COM (2021) 450-451 final du 15 décembre 2021, Des cycles du carbone durables.

DIETRICH F., dans TORRE-SCHAUB M., JÉZÉQUEL A., LORMETEAU B. et MICHELOT A., Dictionnaire Juridique du Changement Climatique, Mare & Martin, coll. « Collection de l’Institut des sciences juridique et philosophique de la Sorbonne », vol. 69, 2022, Entrée « Puits de carbone » p. 459-460.

HELIN T., SOKKA L., SOIMAKALLIO S. et al., « Approaches for inclusion of forest carbon cycle in life cycle assessment – a review », GCB Bioenergy, 5, 2013, p. 475‑486.

HENNING T. et SALAMA F., « Carbon in the Universe », Science, 282, American Association for the Advancement of Science, 1998, p. 2204‑2210.

MENDELEYEV D.I., The principles of chemistry, Longmans, Green, vol. 2, 1905.